Il avait encore l'impression que ses doigts tremblaient lorsqu'il rejoignit son dortoir. Il avait encore du mal à se dire que ça ne serait plus son dortoir désormais. Comme ça, du jour au lendemain. Ce matin encore, il s'était dit que ça serait une journée comme un autre,et ça aurait dû l'être.

Zeus devait s'ennuyer ce jour-là. Il s'était glissé dans la foule de l'arène pour observer les "espoirs" de cette année, sachant que certains de ses progénitures y seraient. Darryn était très bon en combat, il le savait. Il dédiait quasiment tout son temps libre pour ça. Il avait une rage à canaliser, mais ne voulait pas céder à la destruction ou irascibilité. Comme tout, la rage devait se maîtriser.

Il s'agissait d'une compétition avec une série d'épreuves physiques. Ce qu'il avait pensé être un examen devint finalement le moment que son géniteur choisit pour le reconnaître comme son fils. Il n'avait pas été prévenu. Le choc avait dû se lire dans son visage quand tout à coup les applaudissements se muèrent en inspirations de stupéfaction et qu'on le pointait du doigt.

La marque de Zeus était apparue au-dessus de sa tête.

Les applaudissements qui suivirent ensuite bourdonnaient encore dans ses oreilles quand il retourna vers les dortoirs d'Hermès. C'est le coup d'épaule d'Alastor qui le tira de son état d'apathie.

Ah.

C'est en voyant son expression enragée que la buée semble se dissiper dans son esprit.
Il n'était pas plus heureux maintenant qu'il était reconnu.

« Rien. »

C'était une réponse nulle, lui-même le savait, mais c'était la première chose qu'il eut le réflexe de répondre.

« J'ai rien vu venir. J'étais dans l'arène. J'ai passé les épreuves. Comme d'habitude. C'est arrivé comme ça. »

Il ne savait pas pourquoi il avait l'impression qu'il devait se justifier. Mais il savait très bien ce que Alastor ressentait. Il l'avait ressenti à l'époque où c'était David qui avait été reconnu aussi. Darryn avait rêvé du jour où ça lui arriverait. Parce qu'il s'était dit que soudain, sa vie prendrait sens. Qu'il n'avait pas fait tout ça pour rien.
Et maintenant que c'était fait, il se rendait compte que ça lui coûterait probablement plus que ce qu'il gagnerait.

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Darryn sent la colère monter. Il se retient, parce que ça n'est pas contre Daisy que c'est dirigé, mais c'est la personne en face de lui, et c'est lui qui exsude de violence et d'amertume, de son attitude et dans ses paroles.
Ce n'est pas sa faute, il ne l'a pas voulu. Que pouvait-il expliquer de plus ?

« Je mens pas. J'ai pas voulu ça. Pas comme ça. »

Il ne voulait pas revenir sur sa promesse - et il ne la changerait pas. Daisy était toujours son frère, qu'il soit revendiqué ou pas n'y changerait rien.
C'était juste un nouveau dortoir.
C'est ce qu'il essayait de se dire.

« Et j'ai jamais dis que tu serais plus mon frère. Ca veut rien dire, cette marque. J'vais juste changer de bungalow, et rien de plus rien de moins. C'est pas parce que j'ai eu une marque pendant deux secondes sur la tête que j'suis une autre personne ! »

Il a presque envie de rire. Il n'a même pas de sacs pour ranger ses affaires et les amener d'un bungalow à l'autre. Comme la plupart des gens ici d'ailleurs. Ils étaient tous amenés ici pour coller dans un moule et les forcer vers une destinée dont il ne voulait pas.

Pourtant, Darryn ne comptait pas changer.
C'était toujours lui, le fils qui ne voulait que revoir sa mère, qui n'avait pas demandé à être là et faisait ce qu'on lui disait juste pour avoir ce qu'il voulait.
Sortir de cet endroit.
Avec Daisy.

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« Et qu'est-ce que tu ferais à ma place ? Daisy ? »

Ce n'était pas comme si il pouvait dire "non, je n'en veux pas, de ta bénédiction". Parce qu'au fond, oui, il l'avait voulu. Oui, égoïstement, il était fier. Oui, une part de lui se sentait mieux d'avoir été reconnu. Il aurait dû célébrer avec les autres, mais il ne l'avait pas fait. Parce qu'il craignait la réaction de Daisy, et il avait raison.

« Si t'avais été à ma place, j'aurai pas été en colère. J'aurai été fier de toi. Et je me serai défoncé pour te rejoindre. »

Il lui disait qu'il était ridicule. Peut-être.
Darryn savait aussi que Daisy ne maîtrisait pas ses émotions, qu'il parlait plus vite qu'il ne pensait. Il ne voulait pas le quitter en mauvais terme.

« Alors tu vas faire quoi maintenant ? M'ignorer ? Ou essayer de faire ce que j'ai fais pour que Zeus te reconnaisse aussi ? »

Il ne savait même pas quel exploit il avait réalisé, il savait juste qu'il avait essayé d'être un modèle de droiture. S'il en était capable, Daisy aussi.

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Darryn sait bien qu'il n'est pas à la place de Daisy. Evidemment, il avait fallut que ça soit dans l'autre sens. Peut-être que c'était ce que voulait Zeus, essayer d'instaurer de la compétition entre eux deux. Parce qu'il ne fallait surtout pas que ses enfants s'entendent bien. Il fallait qu'ils se surpassent les uns des autres.

« Tu réponds pas à la question. Parce que tu sais que si t'avais été à ma place, t'aurais fais le fier. Et tu vois que je le suis pas, et t'es quand même pas content. Alors c'est ça ? Pour toi ? Au fond, on est frère que si on est tous les deux reniés ? Si c'était toi qui était béni, quoi ? J'aurai plus été au même niveau que toi et tu m'aurais laissé ? Ou on serait resté frères que si c'était moi qui était resté sur le côté ? »

Au fond, Darryn connait déjà la réponse et il ne l'aime pas.
Il n'en voulait pas exactement à Daisy, parce qu'il avait plus ou moins compris entre les lignes qu'il avait eu une enfance difficile. Que le besoin d'attention était pratiquement pathologique et que la colère était son mécanisme de défense.

« J'ai pas rampé pour être reconnu. Mais j'ai fais ce qu'on m'a demandé. J'ai respecté le règlement. J'ai suivi les règles. Alors tu crois sérieusement que "conquérir New-York", ça va fonctionner ? »

Il secoue la tête.

« Je comprends que tu sois vexé et en colère. Ca veut pas dire que tu dois agir irrationnellement. »

Il hésite. Quand Daisy est comme ça, il ne sait pas comment lui parler.

« Tu veux pas juste. T'asseoir ? Et essayer de trouver avec moi ce qui fait que Zeus a ouvert les yeux deux secondes dans ma direction ? »

Parce qu'il essayait encore de se râcler le cerveau pour trouver, lui.

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« Ah bon, on rampe tous ? Alors me reproche pas de faire ce que toi aussi tu fais. »

Ca tournait en boucle. Daisy n'aurait jamais été satisfait que s'il avait été reconnu.
Quoique, non. Darryn avait beau l'être, au final il ne ressentait que de l'amertume.
Il gagnait un lien familial inexistant pour en perdre un qui comptait réellement.

Il sait qu'il n'arrivera pas à faire raisonner Daisy quand il est comme ça. Alors il se tourne, prend le premier sac qui lui tombe sur la main, y fourre les affaires qu'il peut mettre dedans et balance le tout par-dessus son épaule.

« Souviens-toi que j'aurai essayé de te parler, Daisy. Et que c'est toi qui
a refusé. »

Du temps, il lui en laisserait s'il le voulait.
Mais il sait que les dégâts sont déjà fait et qu'ils sont irréparables.
Du temps, c'est ce qui allait creuser encore plus l'écart entre eux.
Darryn part rejoindre le bungalow de Zeus, un dernier regard vers son frère qui l'ignore.

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