Calme et bien être. Une quiétude ambiante dans la chaleur des bains. Hazel ne peut qu’apprécier et remercier sa tendre amie qui lui offre quelques heures de détente privée. Les yeux clos qu’elle vient profiter de l’instant, le silence seulement brisé par l’eau qui s’écoule autour d’elles. Côte à côte, elles n’ont pas besoin d'échanger, simplement perdues dans leurs pensées et réflexions réciproques sans pour autant que le mutisme n’en soit gênant. Car dans ces lieux on cherche à se détendre, à oublier ses soucis pour se concentrer sur son bien-être. On tend à s’oublier peu à peu, jusqu’à peut-être s'effondrer entièrement dans la source tiède.

“Hum ?”

Qu’elle vient entre-ouvrir un œil.

La douceur dans sa voix n’échappe aucunement à Hazel. Si ailleurs, l’enfant d’Apollon aurait pu maudire que sa tranquillité soit ainsi bafouée, le son de Dionne pouvait jusqu’à ses oreilles, sonnée comme une parfaite harmonie.

“Je pense que c’est à elle que tu devrais poser la question.”

Finalement ses deux sombres pupilles viennent se braquer sur sa vieille amie, fille d’Hébé. Si Hazel était convaincue que Malice était sa plus grande amie, elle pouvait remettre en question ses propres capacités.

“Elle est toujours et à toujours été à mes côtés.”

Dans toutes les circonstances et les pertes qu’elle avait causées. Des bras dans lesquels elle avait pu pleurer et se confier.

“J’ai toujours pu compter sur elle.”

Sans aucun jugement et avec une grande sincérité ; du moins, aveuglée - c’était ainsi qu’Hazel voyait les choses. Inconsciente car depuis toujours, elle avait été surprotégée de bien des façons.

“Pourquoi ?”

La tête qui s’abaisse légèrement et vient briser le contact visuel qui s’était installé entre elles. Hazel, penaude fixe l’eau chaude, comme une enfant qui venait d’être surprise dans un acte d’idiotie. Si l’enfant d’Apollon ne cherchait pas spécifiquement à se rabaisser, elle avait bien conscience que ses propos sonnaient ainsi aux oreilles de Dionne ; la vérité était pourtant là parce que son retour d’amitié envers Malice était bien différent que ce qu’elle recevait d’elle.

Elle en vient alors à glisser délicatement dans le bassin, l’eau qui engouffre son menton, puis sa bouche et son nez – mais s’arrête juste avant ses yeux. Quelques secondes où elle ne fait que réfléchir et penser, l’envie alors de continuer sa descente pour être entouré de silence ; d’un rien constant. Et lorsqu’elle reprend une position un peu plus confortable, que la main de l’enfant d’Hébé vient frôler la sienne, Hazel sursaute légèrement mais la laisse s’y accrocher.

« Je sais mais… »

Un soupir.

« Que veux-tu dire par déséquilibre ? »

L’unique déphasage qu’elle avait jamais ressenti dans ses relations était ce qui entait ses nuits depuis sept ans maintenant. Un événement sanguinaire qui lui avait fait perdre deux amis ce jour-là, deux amis dont l’une marquée avec évidence tandis qu’elle, n’avait eu qu’une ridicule coupure. La seule impression de déséquilibre avec lequel elle était obligée de vivre maintenant.

S’approche alors un peu de son amie, pour réduire encore plus la distance misérable qui les séparait.

« Je pense sincèrement que tu t’inquiètes pour rien Dionne. »

Léger sourire malingre.

Elle a du mal à comprendre où Dionne veut en venir ; ou plutôt, Hazel n’a pas vraiment envie d’en arriver à une quelconque conclusion. Le regard porteur, presque accusateur que ses sourcils froncent, l’enfant d’Apollon entend ses mots, mais n’a pas envie de les comprendre. L’assimilation est difficile, mais jamais Hazel n’avait remis en cause l’amitié que lui portait Malice. Douze ans maintenant, qu’elles se côtoyaient ; d’abord par pur hasard, mais ensuite pour une promesse sincère. Et si toute son adolescence avait été difficile, elle n’avait jamais été isolé : dorénavant, la perte de ses amis n’était qu’entièrement de son fait et Malice ne faisait qu’être présente auprès d’elle, rien de plus. Elle ne s’immisçait aucunement dans ses autres relations.

« Non, pas vraiment. »

Parce que les mots qui arrivent jusqu’à ses oreilles sonnent terriblement faux, l’impression que Dionne cherchait à la monter contre l’enfant d’Aphrodite – bien que cela ne faisait aucun sens à ses yeux, car ce n’était pas ainsi que voyait l’enfant d’Hébé. Pourtant, inconsciemment elle vient briser le rapprochement qu’elle venait d’instaurer.

« Plus que t’inquiéter, j’ai l’impression que tu t’imagines des choses. »

Hazel savait que Malice et Dionne se côtoyaient, avant que cette dernière finisse par devenir une bonne amie. L’enfant d’Apollon n’avait jamais cherché à connaître leur relation plus en détail.

« Si j’étais vraiment isolé, tu penses que je serais avec toi aujourd’hui ? »

Et tous les autres jours où elles avaient passés du temps ensemble ; ces moments partagés qui lui avait permis de se vider l’esprit pendant quelques instants.

« Je n’arrive vraiment pas à comprendre comment tu peux arriver à une telle conclusion. »

La voix un peu plus dure, qu’elle cherche pourtant à essayer de comprendre le sens de tout ces mots. La vérité cependant, Hazel la connaissait : Malice ne l’abandonnerait jamais et Hazel ferait de même. C’est ce qu’elles s’étaient promis.

C’est avec une vraie sincérité qu’Hazel essaye de comprendre. Elle tend à réfléchir pour se souvenir d’élément contraignant, mais rien n’y fait. Tout semble faux, infondé. Et seule leur promesse d’antan prime sur des paroles qui semblent dénuées du moindre fondement.

« Je n’ai jamais pensé une seule fois que tu pouvais être jalouse ou puérile. »

Elle secoue la tête de droite à gauche, ses propres pensées étaient embrumées par la chaleur des thermes.

« J’essaye de comprendre, vraiment. De trouver un sens à tes avertissements, après tout, tu m’as toujours été de bon conseil ! »

Hazel appréciait les moments passés ensemble et les conseils qu’elle avait pu lui prodiguer lors de leur sorties et discussions. L’âge de Dionne ne l’avait jamais dérangé, bien au contraire ; l’enfant d’Apollon appréciait son vécu et sa sagesse à bien des égards. Pourtant, cette fois-ci, elle n’y arrivait pas. Ne comprenait vraiment pas.

« Crois-moi lorsque je dis que je suis touchée que tu t’inquiètes de ma relation avec Malice, mais tout va bien. Vraiment. »

Elle tend alors son bras en direction de la fille d’Hébé, pour qu’elle revienne à ses côtés.

« Peut-être qu’elle était un peu spéciale autrefois. »

Bien qu’elle n’en avait jamais tenu rigueur lorsqu’elle était au camp, Hazel avait entendu maintes rumeurs sur Malice, qui lui semblaient tout bonnement ridicule. Alors peut-être, qu’elle s’imagine, que c’est de cela dont Dionne fait écho.

« Mais aujourd’hui, il n’y a rien d’étrange. Elle fait très attention à moi et je l’apprécie énormément. »

La rougeur de ses joues passerait inaperçu, malgré la pâleur de son teint sous la fièvre des bains.

« Mais si tu y tiens vraiment, j’y ferais attention. »