après l'annonce du mariage ※ atè districtLa porte s’était ouverte dans un grincement volontaire.
La silhouette droite gracile s’était avancée avec une grâce volatile, papillon de nuit s’était invité avant la tombée du jour.
De politesses confondues, elle épousait des tendresses de ses pupilles qui semblaient pourtant vides ; dénaturées de toutes leurs émotions ; froides.

Jolie Alyss, te voilà bien esseulée.

Le sourire qui s’étirait à son visage pétillait d’hypocrisies pincées ; tordait le faciès dans des crispations sans colères. La mort s’invitait le long de la colonne vertébrale ; mais Alyss s’en était accommodée depuis tant d’années que les fantômes ne murmuraient plus que des douceurs lorsqu’ils venaient la hanter.

Je m’attendais presque à voir ton visage tordu de douleur - de colères - qu’au moins des sillons de mascara aient coulé à tes jolies joues roses, Alyss. Mais te voilà, et je ne vois aucune douleur.

Le pas s’avance jusqu’à la première table.
Elle y dépose le carton d’invitation de mariage, dans son enveloppe au sceau rouvert.
Un silence gagne l’espace le temps d’un battement de cils.
Un battement plus tard, le visage penché, Simca amère plisse des paupières dans un sourire crispé.

Dois-je le prendre comme un refus de te présenter au mariage de mon frère ?

après l'annonce du mariage ※ atè districtLe regard pourfendait la pièce en des lueurs meurtrières et le sourire qui s’accrochait péniblement au faciès de l’enfant de la mort avait des allures d’automatismes.

Que sais-tu de mon émoi, douce Alyss ?

Rares étaient les individus qui s’étaient vus accordés le droit de témoigner de ses larmes, de ses colères, de ses égards émotionnels ; même devant son frère ou surtout devant son frère, d’ailleurs, Simca avait toujours revêtu un apparat impeccable, nu de toute forme de vie, mortifère - le cadavre embaumé pour être joli lors de la cérémonie.

Et quel outrage ferais-tu en te présentant à la cérémonie ? Quel outrage y a-t-il à témoigner d’un peu de soutien pour celui qui risque de passer le restant de sa vie aux côtés d’un impropre et impoli gorille ? Je te trouve bien égoïste.

Simca se montrait bien plus sincère qu’à l’accoutumée ;
L’amertume qu’elle ressentait pour Midas transparaissait de ses lèvres et de ses pupilles mauvaises ; roulaient sur sa langue des mots léchés d’aucune tendresse.

Me crois-tu ravie de la situation ou es-tu moins stupide que tu en donnes présentement l’impression ?

Elle déposa un regard sur le carton d’invitation déposé sur la table, avant de relever les yeux sur Alyss.

Puisque le carton n’a pas suffit à te faire comprendre, je suis venue te quérir moi-même. Je te demande de venir. Pas pour fêter l’heureux mariage de deux amants amoureux, mais pour te tenir debout à mes côtés, pour être là à promettre sans le dire que la tête de Midas Warren tombera pour l’affront qu’il nous fera en disant “oui” ; en nous volant Ezra. Pour rendre ce jour moins terrible qu’il ne l’est déjà. Car qu’y a-t-il de plus douloureux que de se marier à un idiot de Sparte sinon de se marier à lui sans que personne ne se soit présenté pour soi, entouré des amis-singes de son nouvel immonde mari ?

après l'annonce du mariage ※ atè districtLes échos brisés de sa voix hurlaient contre les plafonds - contre les fenêtres - le regard du ciel était aveugle aux drames des enfants des grands.
Il résonnait à l’intérieur un sentiment d’abandon - et Simca resta muette.
Qu’avait-elle fait pour protéger son frère ?

Elle papillonna des paupières.
Restait imperturbable ; car la Mort ne saurait trembler face aux voix des vivants ;
Le souffle était resté parfaitement calme - peut-être était-elle éteinte ou froide ;
Si elle devait être parfaitement honnête, la culpabilité ne lui faisait rien pour l’heure.
Se voyait un peu monstre - à se constater indifférente - n’aurait-ce pas du l’abîmer de l’entendre articuler ces mots-là ?

La honte l’avait accablée devant Emon, d’avoir été prise de court ; de ne pas avoir su contrôler ce qui lui avait été imposé par d’étranges ressorts. Elle n’avait rien à prouver à Alyss ; elle pâlissait devant son Roi, mais face à l’amie (ou ce qu’il en restait d’amie) de son frère, il n’y avait rien qu’elle avait besoin de démontrer.

As-tu fini ?

Elle regarda le carton d’invitation terminer de brûler dans le foyer.
Peut-être ne voulait-elle pas d’Alyss à la cérémonie de mariage de son frère, si c’était en ces conditions.
Peut-être était-ce là l’occasion de l’éloigner définitivement de Ezra ?
De l’évincer du paysage.

Puisque tu n’as pas l’air décidée à écouter, je n’insisterai pas davantage - Ezra en sera sûrement peiné. Qu’à cela ne tienne, tu lui as déjà fait part de ta volonté de ne plus le côtoyer, je crois.

Le sourire était resté froid.
Ne ressentait ni l’intérêt ni le besoin de poursuivre l’échange si elle s’assurait d’esquiver le dialogue pour vomir un monologue en dépit de ce que pouvait bien avoir à lui répondre Simca.
Elle n’était pas venue écouter ses émois - surtout si elle avait choisi de ne plus faire partie de la vie de son frère. Cela lui était égal - mais elle s’assurerait qu’elle reste en dehors, alors.

Dans ce cas, Alyss, je ne t’importune pas plus longtemps. Cela a été un plaisir - peut-être unilatéral - de te connaître. Adieu, jolie toi.

La saluant respectueusement dans l’idée de lui fausser compagnie.