ne vivant que des soirées, la nuit arrivait toujours bien vite à New York. mais tu ne l’ornais jamais, laissant cela aux milles lumières de la ville, aux milles perles que portaient les femmes mortelles dans l’espoir de laisser ne serait ce qu’une maigre empreinte dans ce monde, non, toi tu t’habilles de noir pour mieux te fondre dans le monde des vices. donc ce soir, une longue robe en satin proche du corps - elle frôlait à peine le sol vu que tu portais des talons - et dont haut aux manches bouffantes laissait tes épaules complètement dénudées. mais il manquait quelque chose à cette tenue trop simple, alors tu décides d’enfermer ta taille dans un corset et ton cou dans un collier de grosses perles argentées. pour le maquillage tu fais quelque chose de simple à l’exception du rouge vif habituel aux lèvres. c’était à croire que tu présentais les retrouvailles avec Ethel !

tu t’attendais toujours à l’improbable de la part des humains, pire que des monstres, mais à soudainement sentir, entre les danses, les conversations, les rires et les verres d’alcool, une odeur semi-divine ? voilà qui donnait à la soirée quelque chose de plus ! il était difficile d’en trouver lae porteur.se dans cet espace où les odeurs de milles personnes et milles alcool se mélangeaient, mais tu sens tout de même cette odeur s’approcher de toi.
et c’était sûrement elle qui t’avait adressé des mots si tranchants.

tu tournes la tête vers le jeune homme qui s’est permis ces paroles si déplacées et ton visage se revêt d’étonnement mais aussi d'excitation — le visage face à toi sort d’un lointain souvenir. il est maintenant plus adulte et plus sévère que celui d’il y a vingt ans mais c’est bien le visage du petit avec qui tu avais “joué” dans les bois.
tu n’oublies jamais une défaite.
et lui non plus visiblement.

il se présente et tu en ris, ceux que tu accompagnais ce soir aussi, qu’il est rare que tu croises des clients en soirée ! mais tu ne feins pas les heureuses retrouvailles, cette occasion est plus que plaisante pour une vengeance. mais finissais-tu de parler, qu’une sensation froide et aiguë dans la côte te fais frissonner — un couteau avait fendu ta chair. tes yeux s'agrandissent légèrement avant de laisser place à un sourire qui se transforme en léger rire ruiner ainsi des habits si coûteux, tu n’as pas honte ? rien qu’aux siens tu pouvais voir qu’il avait le goût du luxe et des belles choses mais tu as de la chance que ma tenue est toute noire, le sang ne se voit pas dessus… tu lui souffles, sinon tu aurais crié au secours ! au meurtre ! toi, si fragile, blessée sans raison ? mais comment !

pendant qu’il s’est vu subitement éloigné de toi, tu poses ta main sur la plaie et observes ensuite le rouge carmin qui avait teint ta peau bien pâle avant de l’essuyer contre ta robe — tu l’avais dit, ça ne se verra pas. et dès qu’Ethel revient à toi, tu le prends par la main l’entraînant en quelques pas de danse vers une foule où les corps se collent facilement les uns aux autres. ainsi, maintenant corps contre corps, une main dans la sienne, l’autre se glisse sur son épaule — tu raffolais du danger de cette proximité.

on vous croirait presque un couple si proches, se chuchotant des mots doux, riant en unison bien sûr ~ surtout si ça avait été toi ~ un sourire vorace aux lèvres, demi-dieu à portée de main aussi facilement, quel monstre allait refuser ? ça fait quoi ? vingt ans tout juste ? tu as bien grandi dis donc... tu es plus grand que moi maintenant ! avec une certaine tendresse familliale - bien qu’avec tes talons ce soir, vous faites la même taille. la main sur son épaule passe sur son visage en en traçant le contour de sa joue à son menton un si beau jeune homme devenu pourtant si cruel… avec une fausse moue. tu es venu pour me tuer ce soir ? pour te venger ? ou par devoir civil ? demandé avec une certaine nonchalance.

malgré vos corps serrés l’un contre l’autre dans cette foule, tu n’étais pas tendue, et Ethel non plus. tu n’avais aucune intention d’utiliser ton pouvoir de paralysie - pas encore - et tu penses qu’Ethel ne se risquerait pas à te blesser à nouveau - pas encore. le sang de la blessure infligée plus tôt goûte encore - il a été généreux et n’a pas percé un point fatal de ton enveloppe charnelle - tâchant petit à petit le haut blanc du criminel.

tu fais une légère moue faussement blessée par sa réponse, mais reprends un peu plus de sérieux, un sourire narquois aux lèvres ooh j’ai face à moi un professionnel, quelle chance ~ tu allais bien t’amuser ce soir ! tu avais soudainement envie de te jeter à sa gorge, planter tes griffes dans son torse, mettre à feu vos environs juste pour le voir se mouvoir après vingt ans, voir comment avait changé le petit garçon tremblant au milieu de la nuit ! et c’est là que tu te mets à détester la promiscuité dans laquelle tu vous avais entraîné.

tu continues à l’entraîner dans une danse similaire aux autres couples oh il faudra m’excuser, quand on a quelques millénaires, il est parfois difficile de ne pas être vieux jeu. bien sûr que tu n’en étais pas désolée, que tu ne voulais pas son pardon, tu en étais plutôt fière d’avoir vécu autant, pour continuer dans cette veine - tu ne me donnerais pas ton prénom par hasard ? si tu m’as trouvé ici c’est que tu dois bien connaître le mien donc il n’est que juste que j’ai le tiens. maintenant qu’il était grand, tu voulais bien connaître le nom de ta future victime car personne ne disait que toi tu n’allais pas le tuer ce soir.

les doigts sur sa mâchoire se serrent soudainement tournant son visage vers le tien afin qu’il te regarde dans les yeux, c’est parce que je n’oublie jamais une défaite. plus froide, une certaine lueur de rage brûlant dans tes iris noirs comme toi, vu que tu es revenu. puis un léger rire te prends quoique, que dis-je ! tu n’es pas cruel ! tu ne peux pas chercher vengeance ! bien sûr ! vous êtes bien différents vous bénis des dieux alors qu’avec nous, affreux et cruels que nous sommes, vous pouvez faire ce que vous voulez ! tu n’avais qu’à le regarder pour voir en lui la divinité enivrante de son sang - corps fort, traits forts et lisses, cheveux blonds - alors que toi tu avais un corps trop maigre, tes traits trop mince, tes yeux et cheveux trop noirs — bien sûr qu’il te regarde de haut !
tu les hais.
tu les hais !
il n’avait rien à venger,
mais toi si.

ta main glisse de sa mâchoire à son épaule pendant que le sourire te revenait aux lèvres. ça te dit un petit jeu ? question rhétorique, parce que dans un mouvement assez rapide tu t’étais élancée vers la gauche tendant le bras, tout en gardant la main droite sur son épaule, et dans ce mouvement tu avais attraper la main d’une jeune femme lui soufflant un excuse-moi ma jolie ~ avant de la lancer dans les bras d’Ethel, te donnant la lancée nécessaire et le distraire rien qu’un instant pour prendre fuite parmi la foule dense de la boîte.
c’était simplement plus marrant ainsi.

un rire t’échappe tu es bien inconstant Ethel ! une minute tu dis ne pas être là pour me tuer et la suivante tu me menaces ? le sourire aux lèvres, tu t’approches pour lui murmurer tu commences à me plaire ~ combien de demi-divinités avais-tu rencontré qui avait autant de cran que lui ? combien avait eu le courage de te menacer sans trembler ?
il y avait trop longtemps que tu n’avais pas senti ce rush d’adrénaline dans ton sang.
tu allais savouré chaque seconde de cette soirée,
et de cette chair.

une fois fondue dans la foule, tu prends un instant pour vérifier l’état de ta blessure en posant la main dessus - le sang commence à peine à coaguler, laissant des traces rouges foncées sur ta main, à nouveau tu l’essuie contre ta robe. tu essayes de calmer ton cœur battant rapidement sous l’effet de l’adrénaline — il y a tellement longtemps que tu n’avais rencontré un adversaire de taille ! mais tu devais garder ton sang froid. toutes les blessures qu’il t’a faites, te ferra, tu devrais lui rendre le double, le triple ! ce soir tu avais interdiction de perdre. tu relèves le regard, cherchant la silhouette lumineuse d’Ethel mais sous les lumières colorées, trop instable de la boîte de nuit tu n’y voyais rien.

tu allais monter en hauteur mais le prochain pas que tu fais tu te retrouves vers l’entrée de la boîte. et devant toi ? la figure rayonnante d’insolence d’Ethel.
un sourire nerveux se trace sur tes lèvres — il manie mieux son pouvoir de permutation. que ça t'agace… que ça t’excite !
tu ne voulais pas lui laisser la chance de trop te devancer, de devenir trop familier avec l’espace des vestiaires y trouvant des points stratégiques. tu déchires ta robe moulante sur le côté - avec ta blessure elle était ruinée de toute façon - pour pouvoir mieux te mouvoir et en quelques pas, tu te retrouves à l’entrée des vestiaires. ne voyant personne - Ethel avait-il par un moyen ou un autre chassé, voir neutralisé, l’employé ? ou n’y en avait-il pas tout simplement à cette heure-ci ? - tu passes de l’autre côté du comptoir, y restant assise en silence, écoutant les moindres petits bruits qui pourraient dévoiler sa position.

si ce n’était pas lui, cela aurait été un.e autre ! il n’y a pas à être aussi égocentrique quand on est un traqueur parmi tant d’autres, un parmi tant d’autres qui ont atteint à ta vie.

quand il s’agissait de ta chasse, tu étais fidèle à aux instincts de tes formes animales. quelques minutes ou quelques mois, différente de certain.e.s de tes adelphes qui se jetaient sur leur proie sans penser, tu attendais toujours, patiente. tu écoutes, un bruissement de textile, des pas et des voix au loin, puis plus proche sa voix. toi ? me faire peur ? tu ris de bon cœur tu as un bien trop grande estime de toi mon cher ~ ! un autre bruit plus lourd, tu te redresses du comptoir, ce bruit recommence et tu comprends qu’Ethel a poussé une des tringles pour créer un effet domino dans l’espoir de t’écraser. ou plus simplement te pousser à te déplacer pour pouvoir t’attaquer.
bingo — tu souris.
tu esquives son attaque au dernier moment, cherchant à être le plus proche possible de lui pour lui enfoncer les griffes dans la côte, faisant éclore une belle fleur rouge carmin sur sa chemise blanche maintenant on est assortis ~ tu lui souffles toute contente avant de bondir quelques pas en arrière dans le tas d’habits. tu remarques que dans ton attaque tu avais arraché quelques petits bouts de peau au traqueur, transforme donc ta patte en main humaine pour pouvoir déguster ce maigre butin de chair divine. cette odeur, ce léger goût dans ta bouche, t’amènent jusqu’à lécher le sang sur tes doigts — tu en voulais plus, beaucoup plus !
tu prends alors le premier bout de tissu qui te tombe sous la main, y met feu avant de le lancer vers Ethel comme diversion afin de lancer une nouvelle attaque.

aveuglée par tes propres flammes, tu n’avais pas eu le temps de réagir à l’attaque d’Ethel. oui, voilà, c’était la seule chose qui pouvait expliquer cela. tu t’étais distraite un court instant voilà tout. et lui avait été assez rapide, assez futé pour en profiter.

tu tombes sur le dos, mais sans fracas, cette ossature humaine ne le permettant pas. tu tombes à ses pieds, clouée au sol, siffles à la douleur aigüe dans ta côte, à la sensation froide de la lame entrant dans la chair humaine. quelle humiliation qu’est ce corps humain. des vacances ? ponctué d’un léger rire. mais ton expression était loin d’être heureuse ou moqueuse, s’en était assez. il t’avait fait une blessure de trop. tu ne supporterais pas ce jeu, cette humiliation plus longtemps. vous aviez assez couru, assez parlé, je pense que c’est toi qui devrait faire un tour aux Enfers. tu poses ta main valide sur sa jambe pour y faire naître une flamme, tu verras, ça sera… édifiant. un sourire aux lèvres.

la flamme est d’abord toute petite, mais grandit mangeant le tissu de son pantalon, grandit parce que tu y concentres toute ta haine envers Ethel, grandit à lui bouffer la peau — tu voulais qu’il souffre.
le feu fait naître des étincelles, se propageant autour de vous, rongeant les tissus de milles couleurs pour les repeindre en rouge. un feu que tu ne penses qu’à faire grandir, les ongles plantés dans le sol, la respiration haletante — tu voulais le voir brûler vif.
tu voulais que toute cette boîte de nuit paye pour son affront.