le monde tremble alors, hors de nos mains.
comment faire pour vivre une journée que l'on sait qu'elle deviendra un massacre ? il n'y a pas de tutoriel sur google. les autres traîtres ne sont pas à mon échelle, faut-il croire. ou, peut-être, n'aiment-iels pas partager. cela ferait sens.
je suis parti-e ce matin et je n'ai rien fait. j'ai pensé : mettons un somnifère dans le jus d'orange de jun. ça m'assurera qu'il reste ici. je ne sais plus si je l'ai fait. je ne vivais pas la réalité. j'étais ailleurs.
je ne suis pas allé-e au laboratoire. je ne sais même plus où je me suis perdu-e. sait-on où aller, quand la fin du monde arrive ? il n'y a pas de papier de recherche là-dessus non plus. enfin, je n'ai pas vérifié. j'en suis sûr-e.
quand les cris se sont fait entendre, et que les bâtiments on commencé à s'écrouler, et que la sirène a retenti, j'ai marché. nomos est plat. je ne voyais rien de ta maison, de l'amphithéâtre, et les gens ne voyaient rien de moi. je ne faisais plus partie de la réalité. la brume m'en avait enlevé-e.
je regarde la fumée. de loin, il y a presque l'air de ne rien se passer. ici, il n'y a plus rien déjà. les gens courent autour de moi. leurs malheurs ne m'intéressent pas. j'ai dans ma main une pierre. ce n'en est pas une vraie. c'est une métaphore. il faut que je l'avale.
je crois que jusqu’ici je n’avais pas compris que tu allais vraiment mourir. je crois que j’étais triste de l’idée, pas de la réalité. la pensée ne se matérialisait pas dans mon esprit. ça n'avait aucun sens. ça n'en a toujours aucun.
je serre le poing. métaphoriquement, je saigne. il y a assez de sang déjà.
j’aurais pu venir devant toi, me dévoiler au monde, demander au monstre de me tuer. peut être que si tu me voyais mourir, tu changerais d’avis.
j'ai entre mes mains mon rainphone. je revois le message. je devrais le supprimer. je clique répondre. je ne devrais pas répondre. j'écris : c'est fait ? j'efface. j'écris : arrête, reviens, il est encore temps. j'efface. j'écris : casse ton rainphone. détruis tout. il ne faut pas qu'iels puissent remonter jusqu'à moi. j'efface. j'écris : je suis dans l'âgon, j'arrive, j'efface. j'écris : précieux s'il te plait, j'efface. mes larmes écrivent : sdklq. peut-être que si tu lisais un de mes messages, tu changerais d'avis.
mais tu n’en vaux plus la peine. je l’ai compris maintenant. je ne veux plus que de celleux qui damneraient le monde pour moi. qui resteraient en vie pour moi. on dit toujours, je pourrais mourir pour toi, mais la vérité c’est que mourir c’est simple. il n’y a rien après. survivre à la mort, c’est autre chose. c’est dans la vie que restent les conséquences.
j’aurais pu y aller. te regarder. fixer tes yeux pour que tu ne puisses pas t’en dérober. qui est-ce que tu aurais regardé ? moi, ou bellamy ? je comprends maintenant que tu vas mourir, est en train de mourir, est mort déjà peut être. je ne t’ai pas arrêté. malgré les mots, les pleurs, la dispute.
je ne t’ai pas arrêté comme je n’ai pas arrêté luther devant luna :
parce que je suis un lâche.

il y a une pierre de plus dans mon estomac. pointue de tous côtés. je sais qu’elle deviendra plus lisse avec le temps. elle fait du bruit en se cognant contre les autres -une toute noire, une violette, une verte. et toi, quelle couleur ? grise. avec une cravate sombre. probablement. je ne peux plus regarder. je ne vois plus rien.
je supprime ton message. après (demain, dans trois semaines, dans 5 mois, quand ça ne paraîtra plus suspect), je supprimerai le reste. je supprimerai tout. comme toi tu le fais.
je reviens au monde. la brume m'enlace toujours mais j'existe de nouveau au yeux des autres. ça ira. elles ont raison. ça ira.
j'appelle quelqu'un d'autre. quelqu'un qui me répondra. quelqu'un qui a su rester vivant. je ne sais pas si je lui partagerais ton fantôme. j'aurais peur que tu le hantes. je ne veux plus de toi.