in the shadow of the dawn ★
tout est si pur en elle
et si violent.


attends Ulysse avec nonchalance.
à la lisière entre l’Atè et Nomos.
petite liste des choses à amasser.
tu la vérifie sur ton rainphone, Blue.
aujourd’hui vous partez ensemble.
soupirant un peu de ne pas être seul.

même si c’est différent avec Ulysse.
complètement, c’est juste que…
t’es une catastrophe relationnelle.
et c’est là qu’une autre du genre approche.
relevant ton regard au son de pas.
Leta, ses cheveux qui battent l’air, déterminée.

légèrement tu te redresses, Blue.
le visage qui se déride un peu à sa présence.
une étincelle dans le regard, joueuse.
ce qui est bien trop rare avec toi.
tu l’aimes bien à Leta, d’une étrange façon.
aussi bizarre que vous puissiez l’être.

▬ J’espère qu’t’es pas la pour vérifier encore qu’j’vais bien ?

c’est que tu la narguerais presque.
l’infirmière qui vient vérifier tes plaies.
cicatrisées depuis des semaines…
pourtant, Leta inspecte souvent ton état.
mais pas seulement, pour ça qu’elle est là.
passer commande à une heure si matinale.

▬ T’veux quoi ?

ton rainphone ouvert sur les notes.
prêts à noter, orbes qui cherchent les siennes.
t’es pas regardant sur ce qu’on te demande.
ça fait partie du job tu penses, Blue.
autant que de ramener des trucs utiles.
attendant que sa voix s’élève pour quémander.

ses pas dévorèrent le jour tandis que l'enchanteresse frôlait les murs et n'apposait ses pas que sur l'ombre des bâtiments — Leta sentait que quelque part, tout changeait. bien sûr, elle n'avait besoin de personne et répudiait toute âme qui n'était pas sienne ou à déposséder. ses essences oniriques n'étaient composées que de grandes récitations, de cris macabres et de carcasses désossées. peut-être tous ceux qui hurlaient ved'ma quand elle les frôlait avaient raison : Leta n'était sûrement qu'une bête arcanique à forme humaine, un monstre corvidé incarné dans un corps de femme — une vraie sorcière.

ses pas guidés par son pressentiment elle retrouva Blue et ses bras se croisèrent en une posture sévère. elle avait l'habitude de leur petit échange et Leta était d'humeur taquine aujourd'hui.
reparle moi comme ça encore une fois et je te change en ver de terre son sourcil se leva un instant non je ne viens pas vérifier que tu vas bien, Gladstone : c'est moi qui t'ai guéri et je fais du bon travail. mais montre moi tes mains : certains réagissent mal à l'ortie et alors qu'elle lui saisit les mains elle lui fait glisser un papier, où sont griffonnés des noms de fleurs et quelques noms d'officines.  
puisque tu vas parcourir le monde, ramène-moi ça. et ne pose pas trop de questions je m'impatiente de plus en plus vite, avec l'âge un sourire malaisant sur ses lippes

la liste prenait des allures de courses mais n'était noircie que par des plantes qu'on ne trouvait pas sur l'île (ou dont la disparition aurait été remarquée) puis les exigences se firent plus morbides : Leta exigeait des cornes et des pollens (sans mentionner les colchiques, hellébores noires et racines de madragore)
et n'oublie pas que ce torgovlya n'implique personne d'autre que toi.
avec tout cette pagaille au sein de la cité je ne veux pas être prise de court. fais toi discret quand tu reviendras : je ne veux pas qu'on t'arrête avec ma marchandise

@blue gladstone

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et si violent.


l’observes croiser ses bras à Leta.
prendre un air sévère sans y croire.
t’en sourirait presque, Blue.
alors qu’elle te menace de te changer.
et en ver de terre en plus !
tu la défit du regard, sans peur et joueur.

son sourcil qui se hausse, le tien aussi.
reflet dans un miroir, elle reprend la parole.
non, elle ne vient pas vérifier ton état.
tu en soufflerais presque de soulagement.
mais non, Blue, tu aimes bien voir Leta.
peut-être plus que tu ne le penses.

elle te demande tes mains, Blue.
et tu n’as pas le temps de les tendre.
déjà elle les a entre ses doigts.
un papier qui s’y glisse, une liste.
bien sûr, loin d’être surpris, tu consultes.
Leta t’invite à éviter les questions.

▬ J’vais bientôt d’voir t’app’ler mère-grand ou quoi ?

coup d'œil vif vers elle, amusé.
juste avant de parcourir la liste.
tu reconnais des choses, Blue.
elle t’en as déjà demandé avant.
c’est là qu’elle te fait tout un laïus.
relève la tête et plonge dans ses yeux.

▬ J’suis ton dealer maint’nant ? interroge du sourcil légèrement relevé. Et penses à m’donner la trad quand tu m’parle en russe, j’comprends que dalle Leta.

tu fais un pas vers elle, grande enjambée.
prunelles toujours perdues dans les siennes.
et tu agites sa liste entre tes doigts, Blue.

▬ T’as dis pas d’questions et j’en pose pas souvent, mais tu flippes d’quoi ? l’air presque sévère toi aussi. J’me mouille pour toi, j’mérite d’en savoir un peu plus.

pliant son papier malgré tout.
tu le cache dans ta coque de rainphone.
attendant sa réponse, droit, comme toujours.

Elle ne souleva pas son humour et le contentera d'un son guttural en guise de réponse. Elle l'écouta parler et les questions de Blue résonnèrent en elle comme miroir de ses propres doutes : de quoi avait-elle vraiment peur ? Était-ce par paresse qu'elle se refusait à affronter tous ceux qu'elle avait trompée au dehors ? Ou craignait-elle en vérité quelque chose, quelqu'un; alors qu'elle se targue toujours de ne craindre personne et de ne trembler devant rien ?
Hmpf. Tu as droit à une question et tu choisis la plus risquée d'entre elles. Elle le fixa un moment, elle aussi. Et quand Leta regardait les gens avec une telle intensité, elle semblait lire dans leur pensée tout en se faisant étrangère à toute interaction humaine. Son regard était sombre, pénétrant mais jamais réciproque. Blue la dominait de plusieurs tête mais c'était bien Leta qui dominait le jeu de regards. En réalité elle ne le jaugeait pas (mais ne l'avouerait jamais), elle réfléchissait à quoi lui répondre, s'il méritait de posséder un tronçon d'authenticité, quand Leta n'était en réalité qu'une usurpatrice passée maîtresse en poudre aux yeux et passe-passes mesquins.
Le contenu de cette liste n'est pas ma crainte, si ça te rassure. C'est de mettre le pied dehors. Quand nous étions tous ensemble, ceux que j'ai ... fâché n'avaient aucun intérêt à me confronter. Sortir seule c'est une autre histoire.
Nausikaa est ma cachette. Je ne lui suis pas fidèle mais tant qu'elle me sert, j'y reste. C'était dévoilé avec une froideur cadavérique mais sans la corruption que l'image connotait. Son ton était aussi froid qu'un hôpital surdésinfecté. J'ai froissé beaucoup de gens, Blue. Et pas qu'en jouant aux cartes.
Je ne suis pas encore prête à les revoir, et encore moins à les confronter. Pas par crainte de perdre le duel mais tout simplement car elle n'en a pas de raison immédiate. Leta n'a jamais appelé Nausikaa sa maison, mais c'est un arrêt stable dans sa course. Le quitter trop vite, ça serait gâcher une hospitalité encore riche.
Ce sont mes premiers besoins, que tu vois là. Si tout se passe bien j'aurais besoin d'un peu plus de ton smelost'. Tu en chercheras la traduction tout seul.

@blue gladstone

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et si violent.


son guttural en signe de réponse.
tu n’es pas du tout surpris, Blue.
mais tu te questionnes quand même.
évitant en général, par pur respect pour elle.
sauf qu’elle te fait froncer les sourcils.
et tu ne crains pas Leta, peut-être que tu devrais.

visiblement tu avais droit à une question.
et tu as choisis la plus risquée de toutes.
ça te fait étirer un rictus presque mauvais.
rien de surprenant venant de toi, Blue.
vos regards qui se percutent dangereusement.
elle a cette façon de fixer, Leta, qui met mal.

pendant longtemps tu n’as pas su faire.
encore aujourd’hui parfois tu triches, Blue.
fixe le nez avec dureté et non les prunelles.
mais ses orbes à elle pénètrent, lisent.
et capturent ; tu ne peux te détourner.
la fuite te semble impossible : tu es une proie.

et tu te surprends à apprécier cette idée…
sa voix qui s’élève te fait battre des paupières.
ramène à la réalité, ton attention toute à elle.
visiblement le contenu n’est pas sa crainte.
effectivement, ça te rassure un peu, Blue.
mais la suite te fait hausser un sourcil.

un éclair d’inquiétude dans tes yeux.
tu croises les bras, pensif et attentif.
finalement ta voix s’élève, Blue.
avant qu’elle ait fini, mais sans la couper.
tu n’aurais pas osé, même sous l’impulsivité.
une réalité que tu avais besoin de poser.

▬ Ça te rend plus humaine.

ce n’est pas un constat qui te déçois, Blue.
juste une vérité qui rassurerait presque.
savoir que Leta peut craindre, avoir peur.

▬ T’en fais pas, j’dirais rien à personne.

avant qu’elle te menace de te tuer ou autre.
t’es un bon gardien de secrets pour le coup.
même si tu roules des yeux à sa dernière phrase.

▬ T’abuses.

pour ne pas dire « t’fais chier, Leta ».
mais tu approuves le reste d’un acquiescement.
sauf qu’une autre question te brûle, Blue.

▬ Pourquoi tu ne t’débarrasses pas d’tes problèmes ? déglutissant. J’veux dire, tu pourrais t’la jouer à la Circé où j’sais pas.

prunelles qui interrogent la fille d’Hécate.
après tout, Ulysse semble être en retard.
et tu choisis d’en profiter pour en savoir plus.

Sans doute résidait ici tout le coeur du problème. C'est que Leta était humaine et elle se détestait pour ça. Elle avait un pied dans le divin, l'autre dans le mortel. Et cette condition si proche du sublime mais qui lui serait à jamais refusée, elle en devenait malade.
Mais je n'ai aucun intérêt à être humaine, Blue. Humanité voulait dire faillible et sensible. Si elle le pouvait, Leta s'opérerait le crâne pour en retirer cette esquille. Elle se putréfierait le coeur si elle en avait la capacité et elle n'en deviendrait que meilleure. L'humain a peur et hésite. Leta ne veut pas avoir peur et sa main devrait être stable.
Quel avantage y-a-t-il à ressentir quelque émotion ? Dis moi, ne crois tu pas que tu ferais bien plus de ton existence sans tes doutes, qui te rendent humain ? Elle s'extrait des codes humains mais ne peut pas lutter toujours contre son essence ; Leta est une sorcière mais n'a pas la prétention d'être éternelle ni divine. Elle essaie de faire la paix avec sa condition faillible et vit avec cette tumeur. En chercher une cure ne l'amènerait qu'à la mort (et elle n'est pas assez bête pour s'y essayer) Enfin, c'est ce que je pense
Elle regarde le paysage un moment et si elle le pouvait, elle aimerait repeindre l'intégralité du monde à son image et y trôner comme une force incorruptible et corruptrice. Le ciel ne serait plus bleu il serait noir ; le jour ne serait rien par rapport au soir. Mais le monde serait stérile et rien n'y pousserait plus, hormis des fleurs de lune et quelque fois des ricanements vespéraux.
C'est prévu. Mais ne m'y encourage pas : ça serait un drame pour vous tous et moi je ne reculerai pas. Mais ne t'en fais pas, quand je m'y attèlerai, le monde entier en sera averti. Avant de s'abandonner à la caricature, Leta décoche un sourire grave envers Blue. Mais ne réfléchis pas trop aux plaisanteries d'une vieille sorcière toute folle et angoissée tu n'en dormirais plus la nuit.
Contente-toi de répondre à mes besoins, spaseeba.

@blue gladstone

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et si violent.


elle n’a aucun intérêt à être humaine.
tu prends l’information, Blue.
ne sachant pas trop comment la traiter.
finalement, tu décides de t’en ficher.
c’est son choix, pas le tiens.
et puis… en tant que demi-déité… voilà.

c’est là qu’elle choisit une question.
complexe au départ, tu en es certain.
mais… tu n’es pas un émotif, Blue.
du moins, pas comme tout le monde.
alors tu hausse les épaules, nonchalant.
juste avant de lui donner ta réponse.

▬ J’sais pas. J’suis pas quelqu’un d’rongé par les doutes perso.

impulsif jusqu’au tombeau.
Leta conclue que c’est ce qu’elle pense.
toi, tu te contente d'acquiescer.
lui posant une dernière question.
elle te titille elle aussi…
pourquoi elle ne règle pas ses soucis ?

la réponse de Leta ne te surprend pas.
du moins, le fait que ça soit prévu.
la suite te fait hausser un sourcil, Blue.
il y a tant de mystères en cette femme.
jaugeant sa risette grave et ses paroles.
un bref éclat de rire t'échappe.

▬ Ouais, t’panses mes plaies et moi j’te ramène tes herbes magiques.

ça peut avoir un côté un peu délirant.
pourtant, ça ne te gêne pas du tout.
tu dirais même que tu apprécies, Blue.

▬ Et Leta, si t’as b’soin d’aide ou quoi, j’suis là. sourire de travers. Enfin… si une vieille sorcière toute folle et angoissée peut avoir b’soin du probable impertinent gamin que j’dois être à tes yeux.

tu le joues sur le ton de la raillerie.
mais au fond, tu voudrais être plus.
malgré tout, tu te contenterais de ça.

▬ J’veux dire, pour d’autre choses que juste… ça.

que tu ajoutes en secouant sa liste.
au loin, tu aperçois Ulysse, Blue.
et un soupir te quitte, déçu.

Elle ferma ses paupières à sa réponse et s’arma d’un soupir amusé. Mais Leta convaincue de ses machinations sournoises croyait avoir compris les gens comme Blue : s’ils se refusent au doute c’est qu’ils se refusent à eux-même. La vie est un carrefour dont les tous chemins mènent à la mort, Blue. Mais ça ne veut pas dire que tous les chemins sont les mêmes. Et Leta sans le réaliser avait peut-être commencer à planter le germe malade et contagieux de cette pathologie invisible mais corrosive. Quand elle réalise la portée de ses mots, elle reste interdite quelques secondes puis se contente de sourire. Si Blue souhaitait rester fidèle à lui-même, il n’y pensera pas. Et après avoir contemplé le monde autour d’eux elle s’attarda un instant sur les iris du fils répudié de la Mort. Je suis convaincue que le jour où le monde te poussera à prendre un nouveau chemin, tu comprendras mes choix. Ou, du moins, tu les excuseras. Leta n’était pourtant pas si énigmatique : elle n’était qu’un portrait d’une femme ayant refusé de souffrir encore et qui n’éclorait jamais plus que pour elle-même.

Oui, c’est à peu près ça. Je t’envoie t’écorcher pour moi et en échange j’en efface tes douleurs. Et sur son regard froid on pouvait désormais y voir un sourire chaud, comme un brin d’humanité qui arrive à se créer un chemin et pousser sur le verglas de ses émotions stérilisées. Ce qu’elle ne comprenait pas toujours, cependant, c’était l’intérêt que les autres pouvaient lui porter. Elle n’était pas chaleureuse et ses angoisses empoisonnaient chacune de ses relations. Pourtant, ils étaient nombreux à danser autour d’elle. C’est gentil, je m’en souviendrai. Elle aperçut, elle aussi, le compagnon de Blue commencer à les rejoindre, au loin. Tu sais, tu n’es pas si impertinent que tu pourrais le croire. Je valorise l’individualité mais ça ne veut pas dire que je méprise tout ce qui n’est pas moi. Elle fixa la silhouette d’Ulysse se rapprocher et ne décrocha son regard que pour fixer de nouveau sa destination. Je te recontacterai dès que tu seras rentré. Sois prudent, rebenok. Alors qu’elle déclara ses derniers mots, Leta commença à s’envoler pour s’éloigner.

@Blue Gladstone