Cela fait quelques minutes qu'il l'observe -le toise, vraiment-, appuyé contre une colonne, les bras croisés. Qu'il devait être simple d'être le fils de Zeus. Un leader né. L'olympe à ses pieds, pour aucune raison.
Le fils bien né le remarque, et avec nonchalance, il se détache de son soutient, s'avançant vers lui à son aise sans le quitter de ses yeux sombres.
David le généreux, le sauveur inattendu.
L'olympien à l'écoute de ses adelphes inférieurs, les mêmes sur lesquels se repose son trône.

- Oh David, merci infiniment, pour avoir fait le strict minimum... Nos routes seront enfin rénovée, mes adelphes n'auront plus peur de trébucher en fuyant un Sparte...

Quelle est grande, la noblesse de l'ambassadeur !
Puis, ses sourcils se froncent légèrement. Des réfractaires...

- Ah oui ?

Et avant que l'ambassadeur ne se perde dans ses pensées, David obtient toute son attention d'un coup : fusillé du regard après cette remarque déplacée, Emon grimace  même légèrement.

- Donne moi une bonne raison, alors !

Ses yeux se posent alors sur son épée, et ses traits se détendent légèrement.

- Tu pourrais me la donner, par exemple.

Un sourire forcé, et digne de s'afficher ainsi lorsqu'il le compare aux enfants de Poséidon. L'humeur changeante, dit il... Pourtant Emon est toujours en colère, toujours salé.

Puis  David est surpris.
C'est vrai que cela change de ses revendications répétitives. Mais, souvent, le fils d'Hadès se laisse fixer cette arme. C'est un peu un symbole de pouvoir, et sinon, pourquoi la  porterait il ?

- Hmhm.

Trait finalement détendus, il l'observe, attendant le refus. Mais non. Alors, il s'approche, à pas lent, passant des yeux de David à l'épée.

- Je te vois toujours avec...

Et il pose ses doigts sur la vieille épée, avant de sursauter; au contact du bronze abimé, Emon se prend une décharge. Un claquement de langue, le retour de ses sourcils froncés, puis il lui retire l'épée, la sous pesant.
Passant son doigt le long de la lame pour inspecter son tranchant.

- Et tu me la donnes si facilement. N'a-t-elle donc aucune valeur ?

Puis l'ambassadeur se recule, teste quelques gestes de base pour voir son équilibre, s'y adapter un minimum, avant de mettre doucement en joue David.

- Et puis... Je pourrais en avoir besoin, un jour.

Oh, il ne compte pas le transpercer ici, maintenant. Un coup de pression ne fonctionnerait pas non plus, mais, dans le doute, pourquoi ne pas essayer de s'amuser un peu.

Lui, sur les planches ?
De toutes les suggestions possible, voilà quelque chose qui ne lui serait jamais convenu. Remarque pénible, mais rien d'étonnant, de  la bouche d'un enfant de Zeus.
Ils prennent de la place, ces enfants rois.
Volent aux cadets leurs droits et leurs voix.

Puis finalement, ses mots le motivent à l'écouter. Emon daigne se montrer moins désagréable au regard, esquissant un léger sourire.

- Hm, oui... Quelle générosité, David, je suis surpris. T'aurais je jugé trop vite ?

C'est plus facile pour lui de lui offrir une arme, héritée de son prédécesseur, qu'une voix au conseil. Ce sera un beau rappel qu'un jour, il la lui plantera dans le coeur.

Et le vieil homme ne se fait pas de vieux os. Sans crier gare, le voilà debout à ses côtés. Main posée sur son poignet, torse contre lui, David vient corriger sa posture.
Emon observe cette main insolente, puis ce torse qui n'a que faire de son espace vital. Mais quelques secondes, et cette pression lui est rendue; le fils d'Hadès s'appuie à ce torse, et ses yeux remontent chercher les siens.

- Que ferais je sans tes précieux conseils...

Quel sauveur, ce David...
Il l'agace. Mais il garde ses sourires en coin, reste doucereux, et joue le jeu.

- Ensuite, professeur ?

Ses yeux l'interpellent.
Comme une impression de regret, dont l'ambassadeur ignorait quoi faire. Une douceur qu'il ne lui aurait jamais attribué, un soupçon, d'authenticité.
Sourire qui le désharçonne.
Son jeu se stoppe, et ses sourcils se froncent légèrement, confus.

Puis, un rire tout juste soufflé, dédaigneux.

- Parfait ?

Oh, l'envie d'utiliser cette épée lui reprend.

- Bien sûr qu'il est parfait ! Mais tu me donnes trop de mérite, je n'ai qu'emprunté celui que vous avez forgé vous même, ne le reconnais tu donc pas ? la minorité, "l'autre".

Alors il la manie, cette épée. Doucement, commence à se familiariser avec. Fend l'air avec grâce, puis s'arrête, en garde.

- L'antagoniste parfait...

L'antagoniste comme bouc émissaire, comme victime idéale. Fausse source des problèmes, les ingrats jamais satisfait de leur condition médiocre. Jaloux du succès des autres, se consoleront ils.
Ses yeux se plante dans les siens, faisant fi de ses sourires; les siens débordent d'une haine accumulée autant par les mortels que par les demi dieux.

- Impossible d'en être satisfait, David... Un sourire doucereux étire ses lèvres, plisse ses yeux sans pour autant les rendre plus doux; Je suis trop perfectionniste pour cela.

Puis son visage perd de ses expressions. D'un sérieux invitant au silence, il le fixe. Jauge, et enfin se prononce,

- Peut être, David, que je t'ai jugé trop vite.

Emon en doute.
Il ne porte pas en lui l'envie de pardonner aux Olympiens leurs manigances.

- Mais tes actions, tes inactions surtout, m'ont influencés.

Enfin il s'approche.
D'une allure qui n'annonce rien de bon. Alors, l'apothicaire reste droit sur ses appuis, relevant légèrement le menton, toujours plus fier à s'opposer au grand David. Il est ce grand monarque à abattre. Le symbole à renverser, une autorité sourde aux plaintes de ceux qui rampent tant il se dresse haut. Pourtant, il lui semble à portée de main, désormais.

Emon l'interrompt d'un rire. Ses yeux plissés par l'hilarité brillent, ils n'ont jamais été aussi sûr de leurs convictions.
Où était-il, où  était Dalhia ? Tous les deux étouffés sous leurs discours. Tous les deux d'ambitions et de moyens différents, voilà où ils sont.

- Oh, David... Les choses se décident encore.

Le bon prince, victime de sa haine injustifiée. Rien n'efface son sourire de son visage. Emon l'écoute geindre en continuant de jouer avec son épée gracieusement. Emon et David, les antagonistes l'un de l'autre. Et qu'il en profite, le noble fils du roi des dieux, car Emon a quelques cartes dans sa manche.
Son sourire se nourrit des rêves de la chute des Olympiens. Ses discours nourrissent ses convictions, et même si les rangs des grands demi dieux se remplissent, sa détermination ne décline pas.

- Tu es trop bon...

Doux David, pauvre collègue qui ne voulait qu'une alliance avec lui. Emon en ricane, puis soupire. L'épée ne le préoccupe  plus, et il vient le détailler du regard, s'avançant de pas lents et assurés.

- Tu as eu tes chances, David.

Sa main s'invite sur sa joue pour y déposer une caresse.

- Où étais tu quand tu aurais dû la saisir ?

Ses lèvres s'étendent en un sourire moqueur. Doucement il se recule, lui faisant encore face. Sa main se retire lentement, ses doigts trainant le long de sa mâchoire, et enfin l'ambassadeur se retourne.

- Merci pour l'épée.