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(terminé) (flashback juillet 2020) Weightless again, Rithy
Abel Kozlovsky
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Abel Kozlovsky
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(terminé) (flashback juillet 2020) Weightless again, Rithy Jeu 22 Juin - 3:01
S’il n’avait jamais porté d’affection particulière pour la géographie, car il ne savait s’émouvoir de l’infinie vastitude des choses, Abel était au moins toujours touché étrangement par l’unicité de la lumière du jour. Le soleil tombait à des endroits sur Terre avec des degrés et des couleurs qui étaient uniques, et qui disaient de toutes les routes les plus banales, les plus semblables à toutes les autres routes goudronnées du monde, que celle-ci se trouvait à cette latitude exacte et point à une autre ; et c’était l’insignifiance, la futilité essentielle même de cette singularité qui l’irritait, pour ne pas lui crever le cœur.  
Ce détail mis à part, il n’avait pas de sentiment particulier au sujet du Minnesota. Il avait beaucoup prévu le voyage en amont, revoyant plusieurs fois avant le départ le trajet exact jusqu’à l’aéroport, puis de l’aéroport à la chambre d’hôte, et il se récitait sous la douche ou avant de dormir la couleur de la ligne de bus et la succession des arrêts comme une litanie rassurante. Une fois arrivé il avait trouvé le vert de la ligne fade, d’un vert unique certes mais sans intérêt, qui n’avait pas retenu son attention, et une fois assis dans le bus, il avait posé ses deux mains croisées sur son sac. Entre ses paumes et le tissu bombé de son sac de voyage, il tenait la main de Rithy, et il avait regardé sans un mot défiler le paysage triste de Saint Paul, où il retrouvait l’accent bleu du nord des Etats-Unis, une teinte qui n’existait nulle par ailleurs.

Il n’y avait rien d’autre à dire. L’émotion de ce voyage ne lui appartenait pas. Il s’était formidablement abstenu de ses propres colères, d’ordinaire si faciles et spectaculaires, tout au long du trajet. Il ne s’était plaint de rien. Il avait fait des communions silencieuses en enterrant tout autour d’elleux le sentiment extraordinairement unique et vibrant de l’instant. Il s’était contenté, lorsqu’il avait fallu attendre de récupérer les bagages sur le tapis roulant de l’aéroport ou que le bus prenait en grinçant un large virage, de glisser vers Rithy le secret exclusif de ses regards, dorés et aiguisés à la lame des soucis. Abel savait, avec le secret des enfants d’Hébé ou peut-être juste des enfants qui ont souffert, regarder dans l’angle de diffraction où se décomposait le camaïeu des émotions autrement secrètes, et y trouver la couleur particulière qu’il cherchait : déception, angoisse, appréhension, colère, rancune tue. Ca ne durait qu’une seconde, après quoi il tournait à nouveau la tête et faisait comme si de rien était. Il consignait simplement ces sentiments étrangers en lui-même, comme un nuancier, dont il ferait usage plus tard.

Il n’avait rien dit non plus, d’ailleurs, lorsque l’hôtesse leur avait jeté un regard de travers et leur avait appris leur erreur de réservation. Abel, en découvrant la chambre, était revenu sur ses pas avait un tout petit peu lutté — c’était une personne exacte et rancunière qui avait le souci du détail et du bon service, mais ça ne servait à rien, la minuscule hôtellerie de six chambres était complète et n’offrait plus qu’une chambre aux lits séparés, impossibles à réunir, car séparés par un guéridon laqué où trônait une lampe avec un large abat-jour et un téléphone suranné. Il choisit par habitude le lit le plus près de la porte — par où il était plus facile de fuir — et avait laissé à Rithy le luxe touristique du petit lit campagnard, surplombé par une fenêtre qui dévoilait un champ de maïs, étincelant sous le soleil d’été. La fin d’après-midi faisait ressortir la couleur moutarde des murs, et les teintes jaunies des photographies et du papier à dessin des rares cadres éparpillés dans la chambre, qui ne représentaient que des gens qui ne leur ressemblait pas.

En silence, Abel s’assit face à Rithy. Il avait son sac entre les jambes et posa les mains sur ses genoux. Il cherchait son regard, comme il savait qu’il devait le réclamer et se montrer patient jusqu’à l’obtenir ; quand ce fut fait, et que le soleil par la fenêtre découpait sur leurs peaux et leurs cheveux un tournesol grotesque de jaune, Abel découvrit, pudiquement, tout ce qu’il avait amené avec lui : la couleur bleue, la lumière du jour, le nuancier des émotions de Rithy, la déception de la chambre, du voyage, et toute la souffrance. Comme il l’aimait beaucoup, il lui avait préparé un texte à trou en avance, qu’il lui présentait quiètement dans son silence, pour que Rithy n’ait pas trop d’effort à faire pour le remplir.
« J’ai regardé ce qu’il y a à faire ici. » Il avait fini par rompre le silence. Il avait soif, chaud, il voulait prendre une douche. Il avait son débit lent des bons jours, sans surjouer l’enthousiasme, Rithy n’était pas dupe et il n’avait pas besoin de lui mentir. « J’ai envie de voir la cathédrale. Il y a un zoo. Il y a le parc Phalen, au-dessus du quartier hmong. » Il marqua une pause, courte et douce, comme simplement pour laisser le temps de respirer. « J’ai noté des restaurants pour manger le soir. Sinon, on reste dans la chambre. Qu’est-ce que tu as envie de faire ? » Anything to feel weightless again
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(terminé) (flashback juillet 2020) Weightless again, Rithy Ven 23 Juin - 11:35

root@abel:~$ python3
Python 3.10.6 (main, Jul 2020, 15:56:13) [GCC 11.3.0] on linux
Type "help", "copyright", "credits" or "license" for more information.

>>> print(“weightless again”)

Dans le bus, je réalise que j’ai fait une erreur. Par la vitre, je ne vois au loin que le vert interminable des champs de maïs encore jeunes, sans rien pour crever la ligne claire qui trace la démarcation avec le ciel d’un bleu presque blanc qui m’avait surplombé en grandissant. Ça me dégoûte, cette platitude : cet horizon sans sinuosité est à vomir. J’ai voulu montrer à Abel l’état qui m’avait vu naître, sans réaliser, depuis le lointain, sa profonde médiocrité : là-bas, quand je pensais à ici, je voyais le vert plus vert et le bleu plus bleu, comme des joyaux qui ne demandaient qu’à être cueillis de nos mains avides, mais ici, ici, c’était très laid. Je pensais qu’en descendant de l’avion, je découvrirais quelque chose dans l’air—une émotion intense, la nostalgie ou la mélancolie de ceux qui ont quitté leur terre trop tôt et retrouvent soudainement des amours oubliés par la sensation du vent qui fait ployer les céréales, ou l’odeur de l’été qui n’était pas la même à la maison. Je ne ressens rien de tout ça, car j’ai retrouvé la seule émotion que m’inspiraient ces grands plans de verdure : l’ennui. Par la fenêtre du bus, j’espère voir un nuage, au moins, ou un homme debout dans les champs qui saccaderait les aplats de couleurs ternes, mais il n’y a rien ; tout est parfait ici, au Minnesota, et c’est pourquoi je n’ai pas eu le droit d’y grandir. Heureusement, il y a les mains d’Abel, elles sont très chaudes, pas brûlantes, mais de cette chaleur dont on se souvient toujours quand on se sépare. Mon métacarpe fait des petites montagnes qui s’enfoncent dans ses paumes, sa peau rejoint la mienne dans les petits vallons où gît la tiédeur, et je pense que c’est ce que je retiendrai de ce moment—je l’espère, ça serait mieux que la tristesse, la très grande tristesse qui m’habite alors. Je suis triste parce que j’ai peur qu’Abel découvre mes fautes dans la fange qui m’a vu naître : ici, dans les vastes champs qui s’étendent à perte de vue, on ne peut rien cacher, rien du tout, et Abel verrait que je suis un enfant de l’ennui, de l’absence, du vide, et que je suis vide moi aussi.
Il est très silencieux, sûrement parce que je ne dis rien. Je me demande s’il a déjà vu le ciel aussi proche du nord, mais je ne lui dis pas, pas parce que je ne veux pas mais parce que je ne sais pas comment le dire ; je ne veux pas demander tu es déjà venu, Abel, dans ce pays calme et plat où on vient juste mourir ? – non, je ne veux pas dire ça. Il a tout prévu, avec la minutie mécanique et anxieuse qui le caractérise, et moi, je suis simplement venu. J’avais dit tu veux qu’on aille vers chez moi, au Minnesota ? et Abel avait tout fait, démêlé les racines sinueuses de ma personne et extrait de ma mémoire la vie que j’y avais mené, il y a longtemps. C’était une idée, comme ça, et il l’avait rendue réelle—c’était ainsi qu’il était, dévoué et amoureux, et c’est ainsi que je l’aime. Quand j’arrive enfin à me détourner du paysage monotone et abstrait, c’est pour le regarder, dire sans mots ma déception en espérant qu’il saurait la lire sans douter ni fléchir, et qu’il la gardera comme un trésor dont lui seul saurait faire usage.

La chambre est une maison, habitée et usée mais pas faite pour nous. Ma tristesse grandit comme une excroissance qui fait son nid dans mon ventre et dans ma gorge et que je ne peux pas arracher. Ce n’est rien. J’entends Abel lutter, sa voix résonne dans le couloir, mais moi, je suis déjà là, dans cette chambre simple au décor suranné qui lui donnait une vie menée sans nous. C’est drôle de se dire qu’il y a eu de la vie dans cette chambre et qu’il y en aura après notre départ, l’espace est à nous sans l’être et je ne sais que faire de moi-même dans cet habitat nouveau où je ne me suis jamais vu. C'est moche. Par la fenêtre, il y a encore des champs—j’en ai assez de les voir. Abel s’assoit en face de moi, comme ça, je ne les regarde plus, je ne regarde que lui, pas ses yeux, mais ses mains longues et claires posées sur ses genoux, ses épaules que la lumière du soleil (plus orange à cette latitude) cerne d’une lumière douce, ses cheveux embrasés aussi et la ligne de son visage. Il rompt le silence, heureusement ; c’est toujours lui qui le fait, je crois. Je m’allonge sur le lit en l’écoutant mais le soleil m’éblouit, trop vif pour mes yeux noirs, alors je me relève pour m’allonger sur son lit, à côté de lui. Je ne veux pas qu’il voie ma défaite face au monde que je pensais mien.
On ira voir la cathédrale, alors, si tu veux.
Je veux le dire avec tendresse, mais peut-être que ça sonne comme une concession ; je traînerai mes pieds sur les dalles de l’église, polies par le passage des fervents qui n’y vont pas avec l’avidité creuse des curieux. Je pense que j’aimerais voir le soleil qui traverse les vitraux—je suis insensible à l’art des belles figures tracées de plomb dans le verre coloré, mais j’aimerais voir les couleurs en kaléidoscope tomber sur le visage d’Abel comme un martyr, plus beau que ceux qu’ils représentent.
Je sais pas ce que je veux faire. C’est nul, ici, non ?
C'est à ce moment-là que j'en ai eu assez de faire semblant, alors, je n'ai pas pu m'en empêcher. Toujours couché, j'ai redressé la tête pour voir le dos rond d'Abel qui dessinait une courbe impitoyable : sa silhouette bloque le soleil qui vient de la fenêtre, et mon visage est abrité par son ombre portée qui me préserve des rayons. Je suis écrasé, alors, par ma déception, elle comprime ma poitrine et mes côtes, j'ai l'impression que le plafond se rapproche. Quand Abel a dit le quartier hmong, ça m'a fait bizarre, parce qu'il ne le prononce pas de la même manière qu'on le faisait dans mon enfance. Il ne le dit pas mal—c'est dans la manière dont la syllabe roule sur sa langue déshabituée aux tons, dans les racines de son être, de sa culture, de son éducation. Je répète le mot dans ma tête, hmong, et je pense que je n'ai, moi, pas perdu la prononciation qui nous vient des montagnes, de la mer, de la péninsule que je n'ai jamais vue mais dans laquelle j'ai grandi, quand même, un peu, dans cette parcelle du Minnesota qui n'y ressemble pas du tout. Hmong. Je ne veux pas voir le quartier hmong. Je veux rester dans l'ombre d'Abel, à l'abri du soleil qui brûle trop vif sur le terrain plat.
On peut rester là un peu ? Je sais pas, en fait, cette chambre me déprime.


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(terminé) (flashback juillet 2020) Weightless again, Rithy Dim 9 Juil - 12:26
Abel avait réalisé en préparant les trajets et le nécessaire des valises qu’il ne s’était jamais fait une idée précise d’à quoi ressemblaient les escapades amoureuses. Il avait, de manière générale, une idée toute faite des relations et de l’amour que l’on peut se porter, se dire, se montrer, que Rithy contredisait chaque jour, avec le naturel détonnant, insolent par nature, qui le caractérisait. L’indolence avec laquelle Rithy précisait les contours de ce qu’était l’amour, en fin d’adolescence, le rendait confus sans le heurter. Mais c’était différent ; Abel avait anticipé qu’il ne trouverait aucun idéal dans ce voyage, car il trouvait déjà les écueils de Rithy sur les frontières des cartes, les vides qu’elle portait sans les montrer dans les colorimétries d’altitude. Abel avait deviné qu’on ne s’aime pas en voyage lorsque l’on est déraciné·e et qu’on ne sait pas aimer. Dès le début, il n’avait rien dit.

Pourtant, il l’aimait. Cette réalité inévitable avait finie par s’imposer à lui. Il s’était penché par-dessus Rithy, les mains posées de chaque côté de sa tête, et il la contemplait de cette hauteur avec une distance placide, sans heurts, qui lui prenait souvent. Il doutait souvent de son amour pour Rithy car il lui était conquis et admis. Mais dans la petite chambre jaune, rance, dont la peinture s’est engorgée sur des années de fumée de cigarettes et d’odeur de textile usé, Abel était convaincu qu’il était de sa responsabilité d’être amoureux ; il se sentait submergé par cet état, il ne devait pas être submergé.

Il aimait de Rithy la mollesse triste et brune de ses traits relâchés face à l’immensité de sa déception, que Rithy croyait sans doute qu’il ne lui connaissait pas, mais qu’il connaissait parfaitement. Il aimait la petitesse de son corps dans ce lit trop peu à la mesure de l’un comme de l’autre, ce lit rustique de passage dont le bois grince et le matelas bon marché s’enfonce durement sous leur poids, ce lit trop petit pour aimer quelqu’un d’autre.
Abel tient en silence une promesse qu’il n’a pas faite ; il dissimule Rithy dans la longueur de son ombre, bleue et froide, constante ; seul son profil à lui, et des morceaux de Rithy sont exposés au soleil orange, qui les incendie d’un crépuscule vif et triste. Il la fixe, la dévisage, l’inonde en silence d’un amour vaste et plein de colère. De colère pour tout et tout le monde, cela va sans dire ; mais cette colère pointait partout dans la direction cardinale de l’intensité avec laquelle il aimait Rithy, éprouvait cet amour, et voulait le venger.

« Prends-moi dans tes bras. » Pourtant, c’était lui qui entoura les flancs de Rithy et roula la tête sur son torse. C’était ses cheveux blonds qui se répandaient en écume sur Rithy ; Abel faisait ce sacrifice, avec une aisance déconcertante, de son amertume. Il la serrait fort, comme à son habitude, il ne savait étreindre qu’avec violence, jusqu’à entendre son cœur battre dans son oreille et leurs pouls se synchroniser lentement. Il savait que la vastitude écrasante du sentiment de déception ne pouvait être soutenu par Rithy sans la heurter ; c’était une preuve d’amour, encore, de l’anticiper et la rassurer avant même qu’elle soit dite, pour épargner cette pudeur détachée qui affligeait Rithy et qu’il déplorait souvent. Il trahit une seconde son jeu, fasciné par l’écho de leurs cœurs, très lointains, affectés par des teintes différentes, bordés par des mots qui ne se prononcent pas pareils, ne se prononcent pas tout court. « Reste avec moi. »
Ce ne sont que des ordres. Même murmurés dans le creux du ventre de Rithy, réchauffés par leur propre écho, Abel ordonnait pour donner le ton, car leur relation s’était mal dessinée ainsi, et il en éprouvait un confort brûlant. Il avait, en arrière-plan de sa poitrine, un sentiment bileux d’amertume, qu’il ne s’expliquait pas. Il redressa le menton pour contempler Rithy. « Si ça te déçoit, on fera autre chose. Ce n’est pas grave. »Anything to feel weightless again
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(terminé) (flashback juillet 2020) Weightless again, Rithy Ven 28 Juil - 23:23

Je ne prétends pas réussir à cacher à Abel ma déception. Il a toujours été le plus lucide de nous deux, et c’était un consensus qu’on ne s’était jamais affirmé que nous respections tous les deux. Pour maintenir l’équilibre, il se laissait toujours empaler des lances de mes colères froides et capricieuses, comme un saint Michel inversé dont le cœur trop amer est offert aux bêtes. Je ne sais plus quand j’ai fini par découvrir à Abel cette nature sacrificielle qui court jusque dans les quatre lettres de son prénom, mais je sais que j’adore, j’adore, j’adore chez lui cet esprit de corps, ce goût du don de soi et de l’offrande perpétuelle qui fait de moi un roi.
Et à cet instant, sur le petit lit de campagne recouvert d’un plaid en laine qui me gratte le cou, il offre son corps comme sur un autel pour me préserver du soleil—il le faisait toujours, le ferait toujours, et dévorerait les astres pour peu que je lui dise que je les avais en horreur. Ça me dégoûte parfois, toute cette abnégation qui dégouline d’un amour dont je suis indigne, que je ne sais pas rendre ; j’ai déjà dit je t’aime, Abel mais ça ne vaut rien face à la matérialité de la chair qu’il me donne. Ça, c’est vrai. Ça ! ça c’est de l’Amour, un amour assez grand pour remplir les plaines, écraser mon passé plat et se dessiner en rouge jusqu’à l’horizon ; c’est un Amour qui se rompt à la ligne du ciel, redessine le paysage, celui du monde mais aussi toute la géographie de ma personne. J’ai peur, j’ai peur que cet amour d’Abel me change, qu’il trouve en moi, en fouillant comme ça, assez d’argile pour mon renouveau, et je n’en veux pas, je n’en veux pas, je n’en veux pas.

Dans l’ombre projetée qui m’enveloppe d’une étreinte froide, il y a une courbe qui porte toute la faiblesse du sacrifice d’Abel : le soleil filtre encore derrière sa nuque, le long de la ligne de son cou, et dessine sur mon visage l’arc de cercle de ma déception. Je sens la chaleur du rayon unique sur ma joue—une trahison. C’était son corps qui trahissait l’insuffisance de son abandon, et peut-être qu’il aurait fallu qu’il soit nommé Caïn. Il me prend dans ses bras qui portent la tiédeur du premier sang versé, il trouve mon cœur qu’il n’a pas besoin de m’arracher, je le lui donne, et c’est bien la seule chose que je pourrais lui laisser. D’accord. Il me serre trop fort, et pour rendre ses caresses, je ne peux qu’accueillir sa tête dans l’étau de mes bras, perdre mes doigts dans ses cheveux blonds qui ont déjà pris l’odeur mielleuse de ce pays austère où l’univers se termine. Ça me crève de réaliser qu’il était chez lui chez moi plus que moi-même j’étais chez moi—j’en mourrais de peine et de colère si je n’étais pas tant versé à l’indifférence.
Oui. Oui, je reste ! oui, je resterai avec toi Abel, jusqu’à la fin du monde, ou jusqu’à son début ; oui, je t’adore, Abel, parce que tu m’adores et que je ne peux pas éteindre le brasier que tu alimentes.

Abel m’écrases et je ne veux pas lui dire, alors je ne bouge pas de ce petit lit qui fait comme un cercueil : c’est approprié d’être mise en terre dans le sol qui nous a vu naître. Je serre plus fort sa tête, une main presse son épaule et l’autre est égarée dans les herbes folles de ses cheveux. Si je voulais lui faire mal, ça serait au moins ressentir quelque chose, mais je crois que je ne ressens rien, rien d’autre que cet amour plastique qui mime celui que je reçois de lui, et qui l’imite très mal, très mal. Son corps est très chaud, ça me donne envie de pleurer – je crois que c’est ça, oui, qui me donne envie de pleurer – alors je dois libérer sa tête de la pression de ma paume pour m’essuyer les yeux.

Tu trouves pas ça horrible, toi ? C’est horrible, ici.

Je pleure ? Ah, oui, c'est vrai, les larmes coulent—je crois qu’Abel ne m’a jamais vu pleurer, et j’ai honte, j’ai très honte, je plaque mes paumes contre mes yeux pour endiguer l'averse qui, dans la platitude de la vie d’ici, serait un déluge comme une hémorragie dans les terres agricoles qui s'étendent à perte de vue. Je pleure, et je ne peux rien faire d’autre que de rester couché là ; écrasée de son poids, je ne peux pas me cacher. L'humiliation est pire que la tristesse, que la colère, que le dégoût, ah ! je ne sais pas. Je crois que c’est un voyage qui fait la cartographie de ma douleur, celle que je ne sais pas dire car je ne sais pas d’où elle vient.
Je suis très heureuse, Abel, c'est promis. C’est pour ça que je pleure !


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(terminé) (flashback juillet 2020) Weightless again, Rithy Ven 4 Aoû - 19:35
Ce plat pays indifférent ne se souviendrait jamais de leurs noms. Un soleil blanc leur chauffait la nuque, à toustes les deux, avec une mollesse mortifère ; il les réchauffait sans les accueillir, davantage par un sens universel d’obligation et de la soumission physique que par appartenance. La chambre, elle, était mieux chauffée, plus choyée qu’elleux, et le soleil détournait les yeux d’elleux sans les retenir. Cette liberté terrible, vaste, anonyme et injuste, s’inscrivait partout sur Rithy dans ses sentiments lâches comme des mailles de laine déliées, cette indifférence, blanche et matérielle, crayeuse, friable, avait fait corps avec Rithy qui avait appris sous ses ongles qu’il n’existait pas. Abel comprenait en même temps que lui-même souffrait d’une forme encore autre d’incorporéité ; il palpait Rithy avec des mains chaudes, sèches et longues, alourdies par une poussière absente qui, elle, le touchait sans se matérialiser, et ne devait pas être vue, ni nommée, ni sentie, pour ne pas trahir la belle kabbale de son pays à lui, qui était fantasmé, clos et inatteignable. Cette contradiction territoriale leur était infligée jusque dans la chair : Abel tenait Rithy comme un torrent de montagne. Les sanglots qui la secouaient ne l’abreuvaient pas. Il posa ses lèvres sur la joue de Rithy, salée et humide, avec un long baiser, et de sa main il entourait son autre joue. Il tournait ensuite le visage pour embrasser, sur sa tempe, les taches du soleil. Il le serrait fort contre lui. Il le contraignait à une frontière.

Il ne dit rien pendant longtemps. C’était inutile ; l’heure n’était plus tellement à convaincre Rithy de déguiser le séjour en fausse indiférence pour couvrir la vacuité de sa peine. L’évidence de sa blessure était dévoilée, et c’aurait été une humiliation supplémentaire, sinon une cruauté, de vouloir la maquiller d’indifférence. Devant la faiblesse matérielle de, on ne peut pas dire : je m’en moque ! sans trahir le sang tout entier de quelqu’un. Aussi, Abel se contentait de le serrer.
« On ne reste que quelques jours. » Il finit par dire, à mi-voix, comme une confidence, douce et assurée ; c’est une de ces paroles mielleuses qu’on dit au coin des autels, là où il faut qu’on soit fort lorsqu’on l’est le moins.

Il était assis sur le lit et gardait la tête de Rithy contre sa poitrine. Il embrassait ses cheveux et son front, puis il détourna le regard vers la fenêtre, qui les inondait toujours de cette lumière insolente qui ne leur appartenait pas. Il affronta les champs jaunes et le ciel bas, jaune également, avec un mépris étranger ; il se sentait plein de colère pour cette terre laide et volée, inintéressante, qui rejetait Rithy. Il devait trouver un ennemi pour cette peine qui ne se défendait pas : Abel créait une guerre, suffisante et inutile, à cette ville reculée, oubliée de toustes, même de ses propres enfants, et il lui promettait en sourcillant l’oubli et la souffrance juste de cette rancune. Il caressait en même temps la nuque de Rithy, par vague.
« Écoute-moi. Je ne regrette pas d’être venu avec toi. » Il avait baissé le nez vers Rithy, parlait d’un ton plus léger et consacrait, à l’évidence de ce soleil suprême, que le seul objet de son intérêt et de son amour était ce petit bout de personne contre lui. Il lui connaissait un corps, un nom, il était en train de le psalmodier à la vue de toustes.
« Ce n’est pas très important si on ne fait rien et si tu n’es pas contente. C’est bien que tu sois venu, tu pourras repartir et ne plus y penser. Si c’est insuffisant, ici, c’est parce que c’est injuste pour toi, c’est que tu es mieux ailleurs. C’est ça, qui est important. » Il espérait presque que la réceptionniste entre pour les découvrir et le voir enlacé·es : Abel lui jetterait alors son désamour, son mépris pour elle, pour ces racines d’elle dans cette terre, comme un coup de poignard dans la gorge, injuste et violent. Il répète, « Je ne regrette pas d’être venu avec toi. Moi aussi, je sais que tu vaux mieux que ça. » ça veut dire : nous n’avons rien à faire ici, pour nous, c’est une identité, et l’identité doit avoir notre nom, c’est notre loi et notre force.
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Rithy Keo
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(terminé) (flashback juillet 2020) Weightless again, Rithy Ven 29 Sep - 17:55

Je réalise ici, à l’instant présent, qu’il ne reste de moi rien de matériel ; qu’il ne reste rien du tout, même. Je suis déracinée de ma propre terre, qui n’était déjà pas la mienne, et il devient évident que tout ce qu’il existe (ou non) de moi est là-bas, sur la côte est, sur une île qui n’est qu’un prolongement, une excroissance contre-nature du monde réel. Je hais – méprise, aussi – l’évidence de mon appartenance à ce lambeau de terre lointain qui est tout ce qu’il me reste. Je suis rejetée de ma matrice elle-même : ma présence sur ces plaines met fin à tout cet héritage matrilinéaire que je pensais mien, et je réalise enfin que je me suis profondément trompé sur ma personne, sur mes origines, et sur mon ancrage même dans la réalité.
Il devient clair, dans cette chambre qui ressemble à une chapelle protestante austère et vétuste, que Rithy Keo n’existe pas.
Je crois que je ne sens plus rien, ni le soleil qui échoue sur ma peau, ni les baisers d’Abel qui pleuvent en réconfort comme pour combler les crevasses qui se forment en mon être comme dans la terre après la sécheresse. Il m’abreuve de cette tendresse qui ne vient pas d’ici, et qui ne se laisse pas mourir dans le silence indifférent de ce pays plat et délaissé, où l’univers n’a pas d’emprise. Je pensais trouver ici tout ce qu’il y a à savoir de moi et des métaux flexibles qui forgent ma psyché mais, dans les sillons argileux des terres agricoles, je ne me retrouve pas. Les moissons ont balayé les graines de mon enfance, et les arbrisseaux plantés ici dans ma jeunesse ont gelé pendant l’hiver—tout de moi est perdu, et je dois tout reconstruire. Je sens à nouveau la pression des bras d’Abel qui sont un bouclier entre moi et la médiocrité de cet endroit, qui m’a jeté ici comme le ressac. Je dis : Oui. C’est pour outrepasser ma défaite.

Les paroles d’Abel ressemblent toutes à des prières, qui me disent qu’il y a en moi quelque chose de saint, qui n’a plus rien à vivre ici. Le soleil meurt contre son dos, qui en absorbe tous les rayons comme des flèches de lumière ; et dans cet état sans collines, son amour peut tout envelopper. Je lui redis : Oui.
Je veux qu’il tue pour moi tout ce qu’il reste de ce pays : je veux qu’on ne retrouve plus rien de moi, pas même mon reflet déformé dans les yeux avides et torves des gens d’ici. Ainsi, on couvrira d’un linceul notre passage, et je verrai ses iris d’or reflétés dans la lame d’un couteau. Tout, ici, doit mourir ; des vignes aux céréales, tout est mangé par la gangrène, et tous les vices du monde existent dans la sève des cultures qui naissent et moisissent dans les champs—rien de bon ne naît jamais dans le Minnesota, et moi, je ne suis plus vraiment née là. Ma poitrine se soulève au rythme de ma respiration saccadée, qui a mué mes sanglots en colère. Je serre Abel un peu plus fort, et passe une main derrière sa nuque dont la courbe suit la ligne de mon corps : je l’embrasse et mon visage n’est plus creusé du lit torrentiel de mes larmes. Merci.

Peut-être que j’aime assez Abel pour lui montrer la terre viciée qui m’avait vu grandir, et qui m’avait donné, dans ma chair et dans mon sang, toute la faiblesse des gens d’ici. Peut-être qu’Abel m’aime assez pour franchir la frontière nette de ma naissance et voir en moi ce que j’ai bâti hors d’ici. S’il m’embrasse comme il m’embrasse et m’aime comme il m’aime alors que je peux transgresser les limites de ma naissance ; vivre et mourir loin d’ici sans que mon corps ne revienne là. Je crois que ma mère existe un peu plus loin, au-delà de cette ville morte, et ça ne me fait pas de peine de la quitter. Je crois qu’à sa mort, je ne la connaîtrai plus. Ici n’est pas ma terre, et je renie ma naissance.
Je me relève sur un coude pour défaire les noeuds dans le visage d’Abel par des baisers sincères : j’embrasse son front, ses joues, et la ligne souple de son cou, pour tracer moi-même les contours de l’espace où je me sens exister. Demain, on sortira. Je dépose sur sa bouche un nouveau baiser. Je te montrerai. Je te montrerai, Abel, tout ce qu’il y a à savoir sur ce pays où le ciel est vert et où les plantes poussent jaunes, où il n’y a rien ni personne de vrai, où l’on fuit le froid dans des paroisses antiques et où l’amour lui-même est séculaire. Nous gâcherons tout de cet endroit : après nous, il ne restera rien ; voilà mon héritage.


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Abel Kozlovsky
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Abel Kozlovsky
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(terminé) (flashback juillet 2020) Weightless again, Rithy Mer 18 Oct - 23:34
J’ignore, également, qui je suis et où je finis. Surtout, et où je finis. Cela revêt plusieurs significations : je m’octroie des choses en ce monde qui ne m’appartiennent pas, et je fantasme et crains ma mort. Sens-tu la rigueur de la vie, Rithy ? Je sens sous mes doigts que tu la sens enfin, et cela me peine : cette implacable, écrasante, indéniable, inaliénable, inaltérable, pesanteur de la vie. C’est un rocher sous laquelle ta nuque se briserait. J’embrasse ton caprice. Tu m’embrasses : j’embrasse tes larmes. C’est le baiser des suicidés.

Mes bras entourent ta taille. Je pense au soleil qui se couche sur le lointain. Il se couche, c’est le terme ; il s’allonge dans ce lit où le suaire est de vin, et je hais l’autorisation de sa langueur. Nous ne connaissons pas le sommeil car nous n’avons pas de lit où nous reposer, alors je tourne le dos à cette lumière pour laquelle je n’ai aucune reconnaissance et qui, de toute façon, ne nous éclaire que par voie de conséquence, dirait-on ici que le soleil nous flatte le front comme le cul des vaches. Je te serre. Je recueille ma haine dans le puits creusé de ton cou. Je nous renverse un peu en avant, maintenant que tu es dressée ; juste un peu, assez, pour nous enfoncer dans l’ombre. Il n’y a plus que mon dos qui brûle. La fenêtre trace sur le dos de ma chemise un rectangle doré de fiel qui, j’en suis certain, m’insulte et me ridiculise.

Je n’ai pas l’impression de te tromper : c’est sans doute pour ça que je t’, oui, aime, c’est un gros mot que je peux employer, c’est pour ça que je t’aime, et que je peux le dire sans que ce soit un couteau retourné contre ma gorge. Je sens ton petit coeur qui bat encore dans ta poitrine, petit sans affection, petit car il est étroit comme le mien, il a été séché par les vents du nord du pays. Un petit roi de France a son coeur racorni, dégoûtant dans un reliquaire : je sais qu’ils l’ont déposé dans ta poitrine. Il bat à un rythme que je connais, qui est celui de la destruction. Il n’y a pas de vide comme le tien et le mien. Je pourrais en pleurer, mais tu as tout versé pour moi, ça me rend service.

Mon recueillement est terminé. Place à nos amours de jeunesse. « J’ai faim. » Je m’allonge contre ton ventre ; il faut qu’il soit creux comme le mien, j’écoute, d’ailleurs, le rythme lointain de ton coeur inutile, débordé par cette région lasse, qui est la litanie dont j’ai besoin. « J’ai envie de manger ces trucs, » et je ne pourrais pas le dire avec plus de mépris ; en même temps que je parle, la tête sur tes genoux où se répandent mes cheveux, je mime avec les mains en même temps comme j’en ai l’habitude. « l’espèce de casserole, avec, je sais pas, je crois que c’est du fromage frit ? Et des tater tots. Ca a l’air dégueulasse, j’ai vu ça en préparant le voyage, je veux goûter. »

Je lève les yeux vers toi. Je t’ai déjà dit que je te trouvais belle ? Je le pense peu. Je ne sais pas si je le pense, concrètement. Mais je chéris ce visage penché sur moi, épandu dans cette souffrance exclusivement personnelle. Je chéris l’égoïsme de ta souffrance écrasé sur la gloire de ta beauté sans bordure. J’essuie du revers de la main les sillons à moitié séchés qui creusent le brun de ta peau. Je te préfère sans. « J’ai envie de manger ça dans un diner, en mode Twin Peaks. » Je peins le tableau, oui, de cette déchéance qui ne t’appartient pas. Mes mains reposent sur mon ventre, le soleil ne brûle plus que mes jambes, étendues sur le lit. Je sais que tes yeux, aussi, un jour, me rendront ce vide, tes yeux me retireront de toi, comme tu as retiré le plat pays de toi — sauf si je me fais ce fantasme de te sauver et de tromper la fatalité de ton ennui, fatalité au sens propre, comme ça m’arrive parfois, ça me distrait même si je n’y crois pas totalement — sinon je peux savoir comme le plat pays t’a appris par la force tacite de son mépris à n’aimer personne totalement, car tu n’es personne. Je le sais, je t’en remercie. « Tu veux faire ça ? » Mais avant que ça n’arrive je voudrais brûler tout pour toi et que tu m’embrasses encore.
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(terminé) (flashback juillet 2020) Weightless again, Rithy Ven 20 Oct - 11:29

Il y a toute une parabole biblique à écrire sur notre passage ici : c’est mon retour au désert, sur des terres que je pensais encore fertiles. Je n’en veux pas à Abel d’avoir porté au monde ma consécration, qui ne pouvait s’achever qu’ainsi, en foulant l’espace liminal où je croyais être né. Je trouverai, dans ce voyage qui tient du pèlerinage religieux, la force d’asséner le dernier coup de couteau qui viendra parachever mon détachement total et irrémédiable de cette province. Abel, lui, quittera ce lieu avec un petit morceau de moi qu’il ne pouvait trouver qu’enterré ici, à l’ombre d’un chêne, une relique endormie dont la magie diffuse nourrissait encore les champs d’avoine et de maïs de mon propre sang vicié. Maintenant, je suis enfin complète : je peux disparaître.

Les bras d’Abel autour de ma taille me séparent complètement du reste du monde, et c’est bien ainsi. Le noeud tracé par ses omoplates est un rappel amer et juste de l’unicité de notre lien, que l’univers entier ne viendra pas défaire ; c’est une promesse que me fait Abel, et je l’accepte, je l’accepte car je sais qu’après ma mort il empêchera ceux qui voudraient coucher mon corps ici de prendre ma dépouille. Cet amour de chien enragé qui connaît l’heure exacte de sa propre fin est un cadeau que me fait Abel, et que ma personne toute immatérielle ne peut pas lui retourner. Mon coeur est un puit sans fond dans lequel se déversent les pluies torrentielles de sa colère et de sa joie, et je deviens alors le reliquaire de ses passions : je garde ce fragment de lui, comme il gardera un fragment de moi, petit comme un os lavé par les insectes, la pluie et le soleil. Les vertus maritales de cet échange me sont encore inconnues.

Abel déclare la fin de notre instant pieux de mise au tombeau, pour rappeler à mon esprit l’organicité de sa personne et de la mienne. La courbe de sa tête suit exactement celle de mon ventre, dont il doit sentir la chaleur sensible et vivante ; je caresse ses cheveux comme on caresse le pelage d’un animal roulé en boule, un chat ou un petit chien, dont la fidélité ne doit jamais être questionnée et dont l’amour existe sans condition. Le soleil décline. La chambre devient de plus en plus bleue et de moins en moins orange, avec le spleen rural qui caractérise ce rectangle de terre. On peut suivre des yeux la course exacte de l’astre, qui ne recouvre presque plus rien de nous, qui avons perdu le droit à sa chaleur ; Abel, étendu ainsi, n’a l’air qu’à demi vivant, et je sens pourtant, dans le creux de son cou, la course effrénée de son sang. Il s’est saisi de mon mépris pour cet endroit, et en a fait un point de recueillement pour notre affection—nous détesterons tout d’ici. On peut faire ça, oui.
Je ne lui souris pas encore, mais je l’embrasse encore une fois, sans condescendance, sans pitié non plus, avec une cruauté amoureuse qui ressemble à celle des mantes religieuses (on en trouve parfois ici, qui mangent les sauterelles qui déciment les moissons d’orge).

Tu vas voir, toute la bouffe d’ici est dégueulasse. Je sais pas comment ils font. S’il laisse sa main dans la mienne, ou que je donne ma paume en offrande à la sienne, je me sens prête à affronter ce ils élusif qui désigne la masse informe des gens d’ici. Comme il m’avait protégé du soleil, le dos d’Abel me préservera des regards ardents et torves des hommes au même visage qui peuplent le plat pays—ils ont tous, ici, cette face vide et lisse qui se répète en fresque dans mes souvenirs. Y’a que ça ici, des diners glauques. Tu veux marcher un peu et on s’arrête quand on en trouve un ? Il ne reste rien des pleurs que j’ai versé, et les herbes sont sèches à nouveau. Je veux que ses yeux d’ambre balayent les champs, les maisons alignées, les écoles archaïques et les routes interminables, et je veux qu’Abel brûle tout de cette paroisse ; dans le brûlis, sur le sol encore à vif, je pourrai renaître.
Je n’aime que lui.


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