Il y a des décisions qui frappent, qui blessent, qui meurtrissent plus fort qu’aucune lame ne le ferra jamais.
Alors tout le long du chemin, la question tourne, la raison se perd à comprendre. Pourquoi eux et pas lui ? Avait-il fait quelque chose de répréhensible, c’était-elle dit un beau matin : c’est fini.

David était lasse des histoires sans fins, des éternels errances et des chemins qu’il remontait en sens interdit.
Il aurait voulu dire plus tard à ses enfants : ne tombez jamais amoureux des femmes, elles vous volent votre cœur et votre âme.


A la recherche de cette dernière, il s’était définitivement perdu en chemin.

Salut. Son esprit le mène à bon port lui, il le guide dans la brume épaisse qui recouvre sa vie ; oui au moins même si son coeur se meurt, son esprit survit. La machine pouvait alors continuer de vivre.

Même son bonjour se heurte au dos, voilà ce qu’on lui montrera jusqu’à la fin de sa vie, des dos hérissés de piques, des regards en coin : car lui-même ne mérite pas mieux ou peut-être ne cherche-t’il pas mieux et tant pis. Ah. Cool, j’ai hâte de voir Don. Et d’accord pour Divine.

Il semble bien penaud ainsi, debout à l’entrée de la cuisine, à peine débarrassé de sa veste qu’il a presque jeté sur un fauteuil en passant. Je fais peur en effet. Admettre sans concession, sans même chercher à fuir la pointe de douleur qui passait par là. Je terrifie même à l’occasion en effet. Peut-être même tout le temps. C’était un rôle qu’il avait accepté, comme tant d’autres et qu’il portait maintenant en étiquette. Rare sont ceux qui aiment en même temps.

Il se tait à nouveau et quand enfin elle le regarde, il sourit doucement. A peiné peiné, il a déjà chassé de son regard les perles de tristesse (elles sont réservées à ses nuits de beuverie). C’était surprenant de te voir là-bas ce soir-là. Toi qui ne prend jamais partie. Dans le filet de sa voix, il y a peut-être des reproches qu’il ne cherche pas à cacher. Je vais bien je suppose, au vu de la situation.

Il se tourne vers le ciel et se demande soudainement où Ange est.

Pourquoi as-tu réellement rejoint ce groupe Dionne ?

David s’est décidé à cultiver l'honnêteté.

Tu n’es pas n’importe qui en effet.

L’avouer fait l’effet d’une déflagration, une boule qui se noue de tristesse et de fatigue. Devait-il payer pour tous les pots cassés ? Devait-il porter le poids d'accusations, devait-il accepter tout cela ? En observant Dionne, il se demanda un instant si l’entièreté de son monde valait la peine.

Il pourrait décider de partir un jour, de disparaître pour de bon et laisser cette place si délicieuse vacante.
Zeus pondait des mioches à ne plus savoir comment les nommer. Il y aurait toujours un remplaçant.
Lui survivrait jusqu’à ce que trop de monstre lui tombe dessus, ou qu’Héra avide d’une vengeance l’enterre sous ses malédictions.

Sous ses coups d'œil, il ne bouge pas.
Une statue est plus simple à juger, plus simple à appréhender et de Dionne, il accepte le procès.
Peut-être ne supportera-t’il pas la sentence.

Je pensais que tu m’en parlerais, parce que justement la politique n’est rien comparé à nos souvenirs et nos échanges.

Ils avaient enterré trop de gens pour se soucier de leurs désaccords.

Je me fiche que tu les rejoignes, que tu nous rejoignes. Je pensais juste que tu m’en parlerais, que cela ferait l’objet d’une discussion, d’échanges.

Il se tait finalement.

J’ai toujours été comme ça Dionne. Toujours. Mais là, maintenant, tu te sens bêtement coupable alors je te fais peur; peur parce que tu as l’impressions que je te reproches quelque chose.

Il n’haussa pas les épaules, mais la ligne de son corps se détendit ; il ne lui en voulait pas pour son choix, il lui en voulait de lui avoir caché , d’avoir tracé entre eux une ligne de secret.

Je ne t’en veux pas, j’aurais juste voulu…savoir… je crois, juste savoir. Mais la peur que tu as ressentie là-bas, cette peur là, c’est celle que j’aborde tous les jours, celle que je représente. Tu ne réalises pas hein ? Voilà ce que c’est un enfant de Zeus qui s’approche du pouvoir ; une marionnette qui joue à la Terreur.

Et bêtement, il glisse le long du mur libre de la cuisine pour s’asseoir par terre.

J’ai toujours fait peur Dionne.

Le sourire fleurit doucement.

Je crois que je ne sais qu’être comme ça quand je dirige.

On échappe pas vraiment à sa destinée.

L’amertume glisse contre sa gorge et sans réaliser il baisse les prunelles. Il n’avait pas envie de penser à ce qui l’attendrait au bout du chemin, de voir ses échecs et ses réussites donner un fruit final dont il ne serait pas satisfait. Il ne voulait pas penser à ce que serait son jugement, et si lui aussi finalement ne finirait pas au tartare, comme tous ceux qui avaient péché.

Il hoche la tête mécaniquement.

Je n’ai jamais prétendue..

Le masque fond et la peine fleurit le long de ses pommettes. La mâchoire se détend et finalement il embrasse la vision de l’ambassadrice. Tu n’as jamais eu à attendre de moi Dionne, tu as toujours été au dessus de tout ça ? Je ne viens pas ici pour.. je suis désolé.

Il n’avait pas envie de se battre. La perte de jacinthe et sa soudaine solitude le poussait peut-être dans des retranchements qu’il n’avait pas encore connus. Je ne cherchais pas à te culpabiliser. J’ai parfaitement conscience que tu fais tes propres choix, et tes propres décisions.Excuses-moi.

Il sourit à son tour, timidement.

Disons que c’est toujours particulier de mélanger travail et famille.