Il existait un océan caché aux yeux des hommes, un endroit où les femmes mourraient les lèvres gonflées. Un océan de superficialité où le bleu magnifiait le ciel et où les rouleaux d’écume secouaient des perles et du nacre. Un océan où le fond se lisait en se penchant du bâteau

penchez-vous,
embrassez le reflet de vos rêves,
tombez de l’embarcation.


Il existait un océan caché aux yeux des hommes où les femmes venaient y mourir.

Faite d’écume et de songe, Charity ornait les lisières de ce monde de son rire et de sa joie. On attendait rien d’elle, l’enfant béni, la petite mais elle attendait tout de vous. De vous, elle espérait l’attention et la colère. De vous, elle soupirait l’amour et la haine. Ce besoin d’être reflétée dans l’existence du monde entier la rendait légère, presque superficielle.

Elle se lassait d’un rire fracassant, attirait aux fins fonds du lagon ceux ayant eu l’audace de vouloir la suivre. Sa malice était cruelle, sa joie était mortelle car elle ne comprenait pas la violence de son impact. Les femmes se penchant pour la comprendre, pour extraire de ses mémoires le secret de sa beauté, elle les noyait, les détruisait sur les lames rocheuses, à chaque cadavre sur sa baie.

L’eau devenait lumineuse.


Inconséquente comme si demain ne pouvait exister dans l’arrangement qu’elle crée pour sa vie, on ne lui en veut jamais après tout.

Elle n’est qu’une coquine, un enfant des flashs et des billets amassés à ses pieds.

Il existait une thermocline, une zone où les songes s’étiolaient et la vérité luisait parmi les abysses. Charity ne s’y approchait pas, jamais. Craignant les doutes, les regrets, la douleur des travailleurs, la colère des fournisseurs, la haine de ses soeurs.


Putride enfant, la boue de ses désirs paraissait être d’or sous la lune du soir.
Amusons nous, jouons avec l'argent et le destin.
Le gagnant se fera couronné du plastique de demain.

Les remords, les peines, les chagrins peuvent bien attendre une soirée de plus.

(violence : ???)

NaissanceDolores Atkins accouche de triplées monozygotes qu'elle nommera Aurora (Charity), Bonnie (Imogen) et Colombe.


EnfanceLes premières souvenirs de Charity sont flous et cruels, elle se rappelle de tout ce qui n'allait pas, des hommes, des nuits sans sommeil à réviser pour une école où elle ne savait pas si elle ira demain, les mondes fantomatiques avec ses sœurs sous les lourds plaids, l’argent volé dans le sac de leur mère, les courses pour se nourrir.
Charity paie, Imogen choisit et Colombe vole. Elle se rappelle des cris d’Imogen contre leur mère, au début c’était de la faim, puis à la fin c’était de la colère. Elle se rappelle de la fatigue lourde d’angoisse entre ses reins quand Imogen revenait à elles le visage bleuté, le souffle coupé et le sang sur ses mollets. Charity aurait voulu lui donner des bisous sur ses plaies comme ce qu’elle voyait à la télévision, lui chanter une chanson pour tout faire passer mais elle ne savait ni aimer ni prier ni chanter comme les princesses de dessin animé alors elle ne voulait plus s'appeler comme une.

Elle se rappelle aussi de tout ce qui allait. Les promesses de Maman qu’un jour, elle se guérira. Les chocolats rapportés par les hommes que Maman ne voulait pas pour ne pas devenir une laideron. Les baisers sur sa joue quand elle partait le soir, les déclarations d’amour absolus pour revenir le soir et déchirer l’illusion que tout un jour irait bien. Charity demeurait là, les yeux ouverts mais la bouche close, tenant bon pour ne pas détruire au plus la chair de ses sœurs. C’est pour ça que Maman a toujours dit qu’elle était la préférée.  Parce qu’elle ne faisait pas chier.



11 ans Un jour, elles partent. Les trois sœurs plient les valises, les espoirs et les livres et les doudous et les promesses et les idées qu’un jour maman ira mieux. Imogen leur dit comme ça “elle est malade pour de bon” ou elle ne le dit pas. Charity ne sait plus vraiment, elle sait juste qu’elle a serré la main de Colombe et à pleurnicher car dans la rue, on pouvait pas se faire les ongles avec les vernis de maman volé. C’est puéril, c’est niais, c’est elle. Charity ignorait pas la lèvre fendillée et l’hématome sur la joue d’Imogen, la trace que Maman ne les aimait pas assez pour les chérir. Avec la dissimulation de leur sang pas encore découvert, elles partirent. Les rues n’étaient pas tendres mais elles étaient toutes les trois. Charity en pleura avec violence de ces journées d’errance mais personne ne lui répondit. Récupérées par des traqueurs, on leur expliqua entre les couvertures et les trajets en camion qui elles étaient, des enfants de dieux.

Au camp, la cérémonie plongea Charity dans le ravissement le plus concret. La stabilité d’un foyer lui était enfin assurée, la paternité toujours questionnée fut enfin répondu et dans la liesse des nouvelles arrivées, elle se dissolvait.


trois nuits après l'arrivée au camp  Elle le rencontra, Lui. Il paraissait éclatant et bien commun, une figure maintes fois rêvée mais concrétisée. Il ne s’est pas excusé, il ne lui a pas demandé de l’aimer, il lui a simplement parlé. Du monde et de ses créatures, de comment il a tant et au fond si peu, qu’il était fier d’elles, du moins qu’il n’avait pas honte. Qu’il ne se rappelait pas de leur mère mais qu’elle était spéciale, comme toutes les autres mortelles avant et après elle. Et elle lui sourit, de toutes ses putain de forces, elle lui sourit. Parce qu’elle aimait être ainsi tenue comme si elle était précieuse. Alors elle lui a dit qu’elle l’aimait et Hermès a rit, de son rire de négligence, la cruauté toute ordinaire des Dieux ceux dont les os et la viande ne suffisaient pas à repaître les appétits, il leur fallait le drame commun des existences mortelles. Il lui a offert des pierres venant d’endroits où le soleil ne se couchait jamais, des carapaces de tortues scintillantes et la promesse qu’un jour, il reviendrait. Elle a distribué ses présents à Imogen et à Colombe, les yeux rêveurs.



15 ans Charity fait partie de ces gens que tout le monde aime sans savoir réellement pourquoi, rayonnante, amusante, elle s’enferme dans l’idéal de ce que les femmes peuvent être. Ca plait beaucoup ses crises à deux balles, les grosses larmes quand le petite ami de l’époque ne lui dit pas ce qu’elle veut entendre, c’est son spectacle et sa joie. Toujours aussi attachée à ses sœurs, elle sert souvent d’arbitre entre Colombe et Imogen et les console aux mots trop durs. Elle ne comprend pas pourquoi il ne serait pas plus simple de parler que des jolies choses, on a plus besoin de parler du passé. Une fois il est arrivé qu’elle hurle, qu’elle haïsse Imogen de la violence qu’elle reproduit sur Colombe. Quand il y avait tant de sang sur les draps, tant de sang sur sa sœur, le passé continue. Ne le vois-tu pas Imogen ? De victime, tu deviens coupable. Berçant l’oiseau dans ses bras, elle chantait, charity, comme quand elles étaient enfants. Colombe sa tendre chérie, elle a pardonné à Imogen, la victime d’elle-même.


AdolescenceElle regarde parfois la lune en se demandant si Maman les recherche. Mais elle chasse bien vite ses pensées quand les apollon organisent une fête, quand les arès font la guerre, quand les hébé rient, le monde fait trop de bruit pour ne pas être distrait par lui.
Des trois, elle est celle qui prend le plus de lumière. Elle ne s’en rend pas compte, après tout, c’est bien normal, elle est tellement jolie, drôle, et amusante, pas prise de tête. C' est une fille cool Charity.


21 ans La majorité atteinte, Charity bien embêtée par ses années frivoles se retrouvant sans idée pour son futur, alors en errant de job en job, elle se retrouva négociante en huile d’olive. Jackpot. dans l’émule et le bruit des ventes, elle se fait son nom. Il lui semble avoir enfin trouvé sa place. Elle se met à vendre tout et rien, traversant les routes et les marchés, une petite fortune la suivant à chaque changement. Elle fait son nom dans les commerces et les marchés de Nausikaa. Imogen part et Charity n’a à peine de lui dire au revoir qu’elle replonge dans ses activités. Un jour, elle revient. Imogen lui semble sale, elle semble changée, brisée contre quelque chose de trop grand pour elle. Avec l’argent de ses ventes et la tendresse d’une sœur, elle l’invita à séjourner chez elle, à prendre un appartement ensemble. La cohabitation s'installe doucement, Charity prend l’habitude de manger ce que Imogen préparait pour elle et Colombe vient parfois les voir. En coup de vent, dit-elle, refusant de rester dans l’appartement à leur côté.


22 ans Rencontre par accident l’ambassadeur de Niké entre ses allers-retours, un vieillard pour son regard de jeune pimbêche mais il la trouva amusante. Alors à chaque fois qu’elle allait à Olympus, il l’attendait et d’un vieux con,il est devenu un ami toujours aussi con, toujours aussi vieux mais que Charity considérait avec amitié. Il la bénissait parfois et elle lui tirait la langue malicieuse.


23 ans Colombe disparaît. Un morceau du monde s’effrite et la terre est retournée pour la retrouver. Personne ne sait où elle est, personne ne sait où elle est partie. Peu importe combien elle pleure, s’énerve, insulte, maudit, Colombe ne revient pas. Sa colère s’étouffe en une peine immensurable, c’est sa faute. C’est sa faute, elle n’a pas été assez bien. Elle a trop pris de temps, d’amour, d’affection, de lumière. Elle sort pour la première fois de Nausikaa pour la chercher. Conflit avec Imogen, elle lui dit qu’elle reviendra. Elle est revenue mais à chaque fois, le projet de rester chez les hommes mortels revient aussi.


24 ans Dispute avec Imogen, Charity n’approuve pas son lien avec les Olympiens, comprend pas en quoi la traque ramènera Colombe, voit ça comme une énième fuite d’Imogen mais cela s’apaise dans la douleur de savoir que Imogen était blessée. Alors, elle ne lui dira plus rien.  Elle part définitivement chez les mortels après avoir obtenu d’Imogen la promesse de la tenir informée à chaque demi-journée.


24-27 ans Années de folie pour Charity Atkins, elle a commencé petit le pactole amassé sur Nausikaa lui servant de financement de base pour le marché boursier et de fil en aiguille, elle monte sa propre entreprise, puis elle rentre en bourse aussi. Puis sa première société de shareholder, puis la première résidence bâtit par sa société de promotions immobilières, puis le premier ralliement de deux capitales américaines par voie ferrés, puis une autre entreprise, puis une autre là où ses conseillers fiscaux le recommandait, puis les millions s’accumulent. Elle ne les garde pas, relance d’autres projets, achète des marques de distribution, plus d’entreprises, plus de secteurs, plus de tout. L’ambassadeur de Niké la bénit parfois quand il vient et elle lui demande si il l’aime pour faire tout cela pour elle. Il répond que oui alors elle l’embrasse sur ses tempes. Les milliards tombent dans les comptes bancaires, les impôts baissent, les biens matériels deviennent des pièces de jeux dans son esprit défait. Le vanuatu possède certains secrets, la suisse d’autres, les caïmans encore d’autre, panama peut être plus encore ? Elle ne sait plus. Mais son nom doit être partout chez les mortels, des USA jusqu’en Afrique, du Japon jusqu’en Colombie, si colombe est encore en vie, elle doit entendre son nom.


De nos jours Les récents événements n'inquiètent pas plus que ça Charity, Elle peut payer ses défenseurs après tout. Elle paie déjà assez cher pour s’assurer de la sécurité et de la prospérité des traqueurs, elle paie déjà assez cher pour les olympiens et leurs projets, pour l’urbanisation de Nausikaa, elle paie. Et quand son tendre ami part des Olympiens qu’il veut désormais sa paix, elle l'embrasse encore une fois. Il en avait déjà assez fait, elle avait tout ce qu’elle voulait, désormais, pas vrai?