deux assiettes rejoignent la table, au milieu des couverts déjà disposés. tu as décoré la table de quelques touches orangées pour sublimer la subtilité de l’automne qui doucement prend ses marques ; et au milieu de tous ces tableaux macabres, tu y trouves une parfaite harmonie. un coup d'œil à ta montre et tu vois le temps qui se presse, quand tes pas sont si lents. la fatigue (de l’âge) te rappelle que tu es un homme bien occupé et, de ce fait, que tu ne dois pas te laisser submerger.

ton oeil dérive, observe la beauté de ta demeure qui n’est que l’expression pudique de tout ce que tu gardes à l'intérieur de toi et, face à toi, tu remarques la porte de ton bureau secret, la clé encore dans la serrure. quelle stupide erreur. tu t’en vas fermer à double tour l’antre de tes monstruosité, riant d’imaginer qu’une étourderie puisse te mener à ta perte. mais quelle tête ferait yong-nam, en découvrant que tu es si épris des morts ?

dans un soupire se dessine un sourire, et l’on sonne à la porte. tu joins tes mains, offre un regard malicieux au ciel. merci d’être si drôle, d'apporter un peu de piment à ton existence vieillissante.

aujourd’hui tu accueille ton fils de cœur, sans prendre la peine de rajeunir ton teint non, tu acceptes d’être un vieil homme de cinquante ans quand ton brave garçon de vingt-cinq ans vient à ta rencontre.

« yong. » la porte s'entrouvre et tu l’encadres immédiatement de tes bras. ce n’est qu’après cette étreinte chaleureuse qu’il l’invite silencieusement à entrer.

« tu vas bien ? bien sûr. » alexander s’estime seul maître capable de faire ressentir la peine et la douleur. sous son toit il fait bon vivre, jusqu’à ce que l’on ne passe entre les lames de ses scalpels. « déjà un mois. » tu l’aides à retirer sa veste (ou bien lui imposes-tu de la retirer ?), lui indiquant d’un geste simple que la table le réclame.

alexander fait les poches de son invité, quand celui-ci lui tourne le dos pour aller s'asseoir. il y récupère ce qu’il peut y récupérer (sinon rien) ; simple curiosité déplacée. il le rejoint finalement, s’asseyant à ses côtés et non pas en face. ses coudes s'appuient sur le bois, et il dépose son visage dans le creux de ses mains, dirigé vers le garçon.

« j’ai beaucoup pensé à toi, ces dernières semaines. je me suis souvenu de quand tu venais à l'hôpital pour que je m’occupe de toi. peut-être un jour t’occuperas-tu de moi, en échange ? je vieillis, j’y pense. mon dieu. j’ai peur d’oublier le bruit de tes pleurs, le son de tes rires, l’expression de tes peurs. » il est pourtant souriant. « mais tu ne me laisseras pas oublier. » il continuera à pleurer.

curieux garçon, dépourvu de la moindre pudeur. il a les bras abîmés​ par les sévices de la vie mais le rire cristallin en observant la mort que tu encadres, fier, pour donner à tes murs un quelque chose de douillet. pas de doute pour toi ; yong-nam était le meilleur cadeau que tu ais pu voler au monde (on ne te l'aurait jamais donné). tu parais simple et heureux quand il est là ; probablement moins désagréable et tortionnaire qu’à l'accoutumée.

« tu ne crèveras pas avant. » déduis tu, naturellement. tu observes ses mains, et plus particulièrement ses ongles rongés ; puis ses bras, parsemés de souvenirs qui ne t’appartiennent pas et tu jalouses un peu ces cicatrices qui jamais n’auront ni ta saveur ni ton odeur ; à moins que…

non. un énième sourire sur tes lèvres. celui qui veut dire que tes pensées sont trop sales pour être dites.

tu aimerais saisir l’une de ses mains, la confiner dans la tienne pour qu’il ne s’en aille plus jamais mais yong-nam a meilleur goût après une longue absence.​

« moi vivant : tu ne crèveras pas. et si tu dois mourir avant moi, ce sera de mes mains. n’est-ce pas génial ? comme nos destins sont liés ! »

si hébé t’écoute elle doit vomir son désespoir que de savoir que son propre sang coule dans tes veines, se mêlant au goudron de tes vices. tu aimerais la voir parfois, après tes paroles obscènes, qu’elle le dise haut et fort : que tu es un monstre.

mais pour aujourd’hui tu devais toutefois te contenter d'être un père.

« tu reviens tous les mois sur cette satanée île, et tu es toujours vivant. c’est bien la preuve que tu dois t’occuper de moi… après tout, moi je me suis tellement occupé de toi. »

tu te lèves, quittant la table pour t’absenter une ou deux brèves minutes en cuisine. tu reviens avec tout ce que tes bras pouvaient porter : une bouteille de soda, importée d’amérique (le fameux coca cola), plusieurs bières blondes dont l’étiquette hurle au classicism, et une dernière bouteille plus élaborée que les autres ; probablement de la vodka vu l’aspect du liquide qu’elle contient.

déposant toutes ces choses face au jeune homme tu t’en vas encore une fois, te justifiant cette fois ci.

« j’ai regardé un de tes lives tu sais. ce n’est pas vraiment ma tasse de thé ce genre de format, mais, tu pourras m’expliquer. tiens. »

tes mains font le cadeau d’une enveloppe, où sont logés des dollars. tu aimes l’idée qu’un sacrifice économique, même si petit, puisse donner à yong-nam quelques battements de cœur plus intenses que les autres.

oh oui alexander. tu es un paria de cette société, tu ne t’intègrerais pas mieux non plus auprès ​du commun des mortels. pourtant tu sembles doué de tendresse, capable d’attention. tu penses que ton faux fils pourrait s’indigner de te voir si exceptionnel malgré les railleries du monde ; tu veux qu’il croit en toi plus qu’en la mort elle-même.

qu’il existe sur cette terre, une personne, capable de te défendre contre vents et marées. alors tu seras serein de croire qu’à ton enterrement il y aura quelqu’un.

« je tiens trop à toi pour qu’il t’arrive quoi que ce soit. »

même la liberté ne saurait l’atteindre. tu voudrais fondre sur lui, l’envelopper de ta carrure, le rendre imperméable au monde et l’étouffer dans une étreinte. sentir son corps abîmé crever sous ta force mais la vie te l’interdit, et le temps t’implore patience.

« qu’est ce que tu veux boire ? »

même si tu finiras par lui imposer ce que tu préfères.

tout est léger, fluide, simple. vos échanges mêmes s’ils prennent la forme de serment inviolables, t'apaisent comme des caresses. sauf un détail.

tu te fais vieux, alexander.

ta mémoire te fait défaut, tu oublies des détails qui quand tu t’y confrontes t’énervent. le doute s'empare de toi trop souvent, tes mots parfois se répètent et tu hais qu’on te le rappelle. tu vieillis, alexander. tu vieillis mal.

ça te terrifie plus que tu n’oserais l’admettre. l’inconscient te protège, tu fais mine de trouver sa remarque amusante. heureusement il existe — heureusement il s’occupera de toi. si tu le laisses faire.

quand il récupère l’argent entre ses mains, tu te délectes ; ses émotions sont si pures, terriblement sincères. c’est maladroit, tendrement doux, passionné et timide, tout son corps s’en porte témoin ! tes joues commencent à te faire mal tant ton sourire s’installe à son aise.

« je te donne des sous pour que tu fasses ce que tu aimes faire. »

se couper, jouer, râler, geindre, pleurer, parler, rester silencieux. qu’importe. tu récupères le coca quand il te demande ceci, le dépose devant lui avant de te lever pour te placer derrière lui. tes mains sur ses épaules, dieu si rigides, tu commences à masser, avec toute la dextérité du monde.

« ça m’est égal mon ange. je t’ai déjà dit ; non ? je te soignerais. » ton étreinte se fond, tes doigts glissent et tu l’enlaces contre toi, ton visage accolé au sien. « je pensais que ça te ferait plaisir ; un don. ce n’est pas assez ? ou bien, c’est trop ? je suis maladroit yong-nam ; tu sais… j’espère juste être comme un père pour toi… mais j’ignore comment faire… tu vis loin d’ici, tu t’exposes sur les réseaux, tu es un grand garçon indépendant et moi un vieillard fatigué. »

tu aimerais embrasser sa joue mais ce genre d’affection te répugne un peu trop encore pour le moment. tu te redresses simplement, une tape amicale sur l’épaule en allant chercher le plat principal de cette soirée.

« pigeon aux lardons et champignons. c’est spécial, ça change de la viande classique. »

tu espères qu’il aimera ta cuisine. tu ne la partages pas avec tout le monde.

vos rencontres sont toujours étranges, mais tu apprécies particulièrement comment celle-ci se déroule. tu as dans ta demeure un jeune homme torturé, tu pourrais même caresser ses plaies pour qu’il ressente toute l’attention que tu lui portes mais — tu sais rester prude. tu fournis une monnaie que tu n’es pas censé posséder, pour financer un contenu qui n’est pas censé exister. tu pourrais lui avoir écrit une carte pour féliciter son assiduité et la qualité de son travail mais non, la parcimonie est un art que tu maîtrises.

tu jongles parfaitement entre le trop et le pas assez.

entre l’absurde et la bienveillance.

tu aimes, même si c’est sadique, l’avoir entre tes mains pour entretenir ses malheurs et les napper d’un brin de plaisir sucré, quand la mort amère reste penchée à ta fenêtre pour guetter le moindre faux pas.

« difficile mais pas impossible. » tu ris, t’occupe de servir le plat principal dans vos deux assiettes. tu rejoins à nouveau ses côtés en attendant de le voir prendre une première bouchée.

« demande moi n’importe quoi, tu sais que je me démènerai pour te l’offrir. je t’ai vu grandir et je suis fier de qui tu es devenu. tu mérites toutes les récompenses du monde… et je les trouverai ; ce n’est pas un problème. il suffit que tu me le demandes. »

qu’il prononce des obscénités pour nourrir la névrose qui vous tient, tu serais si heureux de voir l'accomplissement de tous les vices que tu as sournoisement glissés en lui avec tendresse, simplement pour alimenter ceux qui grandissaient déjà très bien sans toi.

tes mains liées tu poses les coudes sur la table pour ensuite reposer ton visage sur tes phalanges, le regard inquisiteur sur sa personne. tu prétends vouloir lui donner le monde mais tu attends, silencieux, qu’il te quémande ce fameux monde.

il mange, tu souris. que l’on goûte ta cuisine te rend heureux, sans que tu n'ait à justifier de quoi que ce soit. c’est si rare, pour tes beaux yeux, que l’on se tente à ingurgiter quoi que ce soit qui soit passé entre tes mains. ils ont tellement peur que tu t’amuses à voler leur vie qu’ils ne remarquent pas qu’ils sont leurs propres prisons. tu manges à ton tour, laissant au silence son loisir de réflexion.

quand il ose enfin nommer une volonté.

« haha. »

rire succinct, tu reprends une bouchée de ton plat. qu’il est drôle ce jeune homme, tu secoues la tête en haussant un sourcil, avale avant de reprendre la parole.

« c’est prévu, ne t’inquiète pas ! »

la plus belle des morts, tu te l’avais promis. pour mieux célébrer sa renaissance, pour te gratifier de mettre au monde — cette fois tel un véritable père ; l’enfant d’hécate. tu déposes tes couverts à ton tour, te tourne vers lui.

« je sais déjà comment je t’habillerai. quels seront les décors, quel sera la musique qui te servira de baptême. quand tu seras prêt yong-nam je te tuerai une première fois, pour que tu naisses comme mon fils. la seconde fois en revanche, je ne peux te la promettre… » tu ignores si tu veux le voir vieillir pour s’occuper de toi ou l’achever pour qu’il t’accompagne définitivement. l’ébauche d’un sourire mélancolique, tu effleure sa joue du bout des doigts. « tout vient à point, ceci dit. tu n’as aucun autre souhait ? »

tu te serres un shot de vodka dans ton verre à vin, le lève à la santé d’on ne sait qui et hydrate ton corps vieillissant.

« m’enfin je te ne force à rien. tu peux tout me demander, n’importe quand, ne t’inquiète pas. »

tu serres à nouveau ton verre, le plaçant cependant devant l’assiette de ton invité.

« tu mérites, après tout. » il a si bien survécu. à la vie. à toi. « je t’ai raconté qu’on venait dans mon bureau comme dans un moulin ? je ne me souviens que du petit yong-nam qui attendait à la porte qu’on l’appelle pour entrer où j’étais. elle me manque, l’époque où le respect était universel. » tu soupires, sans paraître agacé ; puis reprend ton repas. « ils seront punis toutefois. c’est simplement drôle car ils n’en savent rien. j’adore les jeux. »

plus tard. mais il se précise, et tu hausses un sourcil. peut-être ? cette prévoyance maladive à toujours supposer que demain n’arrivera pas pourrait donner matière à ton impatience mais tu inspires, garde dans tes poumons cette envie de le sermonner.

tu saisis le verre après lui, le terminant aisément en une gorgée fluide. tu n’aimes pas l’idée d’une boisson soit gâchée — surtout quand tu ouvres une bouteille en pensant à ta mère. il te faut éliminer les traces, il faut que tout le monde picole pour son hommage : il ne faut pas que le festin s’éternise, pas que se répandent les motivations de sa fête, pas qu’hébé soupçonne que c’est trop suspect, de tant vouloir la célébrer.

« tu trouves que j’ai perdu en charisme ? le petit garçon que j’ai connu osait à peine me regarder dans les yeux… j’imagine que tu as raison alors. » tu souris car il te demande de t’étaler sur ta passion. la torture. « j’ignore encore ce que je ferai vraiment. si je devais me venger d’abel, je tuerai la personne qu’il aime. son insensibilité serait mise à rude épreuve ! lui qui n’est pas capable d’avoir une parole aimante envers sa fratrie… pour madeleine, hm. j’hésite. la dévisager ? ou bien la confronter à sa grande comédie. et puis dionne… dionne si je devais lui faire du mal, je lui présenterai la tête d'un des nôtres. le plus fragile des enfants d’hébé, je pense. qu’elle se déteste ne n’avoir pu protéger personne — ni même moi. ça c’est pour ma famille ! en ce qui concerne le reste, je pense que j’opterai pour la torture. j’ai moins de rancœur envers eux, tu te doutes. » l’une de tes mains, vicieuse, se glisse sur le sommet de son crâne, et tes doigts s'emmêlent dans sa crinière ébène ; tu feins même d’empoigner quelques mèches par moment, pour finalement lui caresser la tête. « dans tous les cas je ne les tuerai pas. il faut vivre pour souffrir, yong-nam. mais tu en sais quelque chose. » ses poignets le témoignent bien assez. « tu penses sincèrement que j’ai perdu en charisme ? si je ne fais plus aussi peur qu’avant alors pourquoi n’ai-je toujours pas d’ami ? j’espère que les tiens sont gentils avec toi. mais si tu n’en as pas je peux t’en trouver. » rien n’est impossible quand on sait comment ne pas laisser de trace.

la candide franchise de cette âme dont tu t’es attitré les mérites et la responsabilité (comme s’il était de toi et d’hécate), voilà ce qu’il y a de plus savoureux dans la jeunesse et que tu ne peux plus retrouver ailleurs que dans l’existence torturée de yong-nam.

il se moque, dévoile-t-il ; et tu songes à l’étouffer dans son assiette, sans bouger le petit doigt. tu fais peur, et tu aimerais le remercier en gravant ton nom dans sa peau, sans bouger le petit doigt. tu devrais lui apprendre, comment tuer et dissimuler le crime ; sans bouger le petit doigt. il n’y a rien que tu fasses malgré les obscénités qui traversent ton esprit, car il n’y a rien que tu pourrais faire pour abîmer la chair de ta chair (prétendue). c’est en vivant ce contraste que tu peux affirmer ce que disent les hommes (qu’ils mentent ou non) : c’est dur, d’être père.

« non… » tu passes un bras sur ses épaules, attire son frêle corps contre le tien. peu de force suffit pour que l’attraction soit faite, et si yong-nam souffre de malaise il ne peut se soustraire à cette étreinte que tu lui imposes avec candeur et rigidité. « non mon ange, non. » tu embrasses les cheveux qui cachent son front, pour finalement le libérer de toi en te levant pour débarrasser son assiette. tu ne sais même pas s’il a encore faim — mais tu t'impatientes. « je ne peux pas t’apprendre tout ça, yong-nam. ça s’apprend tout seul. je ne veux pas être responsable si tu te rates. et c’est facile, de se rater ! tu ne dois pas compter sur moi pour t’aider, sinon tu seras négligeant. débrouilles toi tout seul et je te dirai ce que j’en pense, mais nous ne pouvons pas partager cela. » tu as trop à perdre. si peu à gagner. tu reviens de la cuisine avec un pot de yaourt, simple, parfaitement simple. « mais, ce pascal. pascal petit ? à moins que ce ne soit un garçon des états-unis… haha, pascal petit. j’ai fait peur à un pascal petit, une fois. c’était amusant. tiens, voilà ! ça ! je peux t’apprendre la filature, si tu le souhaites. la filature ce n’est qu’un petit délit. » tu t’assois à nouveau, détaillant les réactions de ton prétendu fils.

haha. pascal. chiant.

tu devines bien de qui il s’agit.

« mais on peut torturer pascal petit si tu veux. »

l’enfant est vexé. tu le vois, tu l’entends, tu le sais — tu le comprends.

tu pourrais éclater de rire et c’est indécent. mais tu le comprends.

toi-même tu n’aimes pas les non. tu veux mais tu ne comptes plus les rejets plus les refus plus les jugements : c’est pour cela que tu prends. c’est profondément indécent. alors c’est pour cela que tu assassines.

et c’est la première fois que tu l’admets, même si ce n’est que dans une pensée silencieuse.

tu es un meurtrier. un cannibal. un tortionnaire. une brute. un psychopathe. tout ce qu’ils disent est vrai, c’est dingue ! ils ne t’ont jamais vu rien faire pourtant !

quand tu observes ton fils tu comprends qui tu es.

« c’est — » impossible à décrire. tu inspires, tu souffles, tes yeux cherchent ailleurs car à trop regarder yong-nam tu te revois petit colérique capable de renverser la table pour obtenir ta friandise. « tu peux… » râles tu. tu t’imagines l’étouffer dans tes bras en lui chuchotant qu’il peut, qu’il peut absolument tout, et son coeur s'arrêterait tout doucement, comme bercé par ta voix ; la fin d’une vie comme la fin d’une comptine… tu peux mon enfant mais tu n’en as pas envie.

inerte à ses côtés, tu observes la bête noire qui a l’allure de ton enfance. tu pourrais le nommer caprice et le marteler pour t’en débarrasser : tu ne veux pas avoir à t’occuper d’un petit toi.

c’est si dur, de survivre, quand on porte l’habit du diable. yong-nam est une petitesse fragile, une feuille qui craint le vent, une eau qui craint la sécheresse. il porterait un couteau à la gorge d’une mère et sangloterait sur le chemin de la prison. il est un toi sans rage. juste épris de peines. il ne survivra pas dans l’autre monde — celui sans règle.

« si tu insistes tant. d’accord. »

tu es convaincu qu’il doit faire ce passage seul ; mais à quoi bon le laisser se perdre. tu aurais peut-être aimé, que l’on te tienne la main, même ensanglantée.

« mais je reste sûr que ce n’est pas ce qu’il te faut… si tu t’entrainais à maîtriser tes pouvoirs, en revanche, je pense que nous pourrions faire quelque chose de grandiose. torturer, rester hors d’atteinte. voir le monde s’effondrer, sans personne pour te soupçonner. c’est un rêve merveilleux que de terroriser les épargnés, ceux qui survivent en voyant les autres tomber… tu aimerais ça, yong-nam ? ce n’est pas ce que je fais moi, mais c’est quelque chose que j’aimerai faire. à travers toi. »