Edzard a un grand cœur. Trop grand, d’après certains. Peut-être que s’il le tendait aux autres, on le lui dévorerait. Et il laisserait faire, parce qu’il en oublierait son existence. Parce que pour quelques secondes de plus, il n’existerait pas en tant qu’Edzard mais pour un sourire. Il ne serait que dents du bonheur offertes, que regard pétillant et les chagrins du fond des poitrines s’effacerait. Peut-être était-ce pour cela qu’il était bien incapable de ne pas tendre la main à ceux dans le besoin. Aux petits chatons égarés laissés à l’abandon dans des cartons trempés sous les pluies battantes. Seren n’avait rien du tout petit félin, mais le désespoir transpirait de chaque pore de sa peau et Ed, oubliant automatiquement ce qu’il était venu faire en ces lieux, ne pouvait empêcher ses yeux de suivre les mouvements presque erratiques de l’autre. Il courait et la chevelure de feu semblait semer le chaos sur son chemin. Les pieds s’arrêtaient chaque mètre et les yeux fous cherchaient, cherchaient et ne trouvaient visiblement pas.

Peut-être qu’il n’était pas l’homme que Seren attendait. Peut-être qu’il n’avait pas la beauté des anges blondinets qui dandineraient de leurs paupières pour plaire et rassurer. Mais Ed a la main douce, ouverte. Il a un sourire réconfortant qu’il essaie de perfectionner chaque fois qu’il l’offre et une voix portante qu’il accentue sans le vouloir pour que l’autre n’entende plus que lui. « Hey. Tu cherches quelque chose ? » Qu’il demande, le grave de sa voix accentuant l’incertitude, le regard cherchant déjà l’objet perdu comme s’il savait de quoi il s’agissait avant de se reposer sur celui écarquillé de Seren. « Je peux peut-être t’aider ? »

Edzard aime les enfants. Leur candeur, leur naïveté et leur rire lui apportent toujours un sourire. Leurs grands yeux presque curieux, toujours, du monde qui les entoure, le forcerait à s'agenouiller pour les protéger s'ils le leur demandait. Trop grand cœur, trop grande pitié, de ses brands bras, il les serrerait pour qu'ils se sentent en sécurité. Et Seren, lorsqu'il lève la tête vers lui en regardant au travers de ses doigts pour lui montrer la forme circulaire qu'une bague était censée avoir, a la forme d'un gamin égaré. Ou qui a égaré quelque chose. Se pencher sur les formes humaines en peine, c'est sa spécialité. Leur offrir un sourire ravissant pour les apaiser, aussi. Brille-t-il comme son père, Edzard, lorsqu'il acquiesce avec un air qui se veut rassurant ? « Mais oui, ne t'inquiète pas, on va la retrouver, cette bague. » Oh ! Comme la paume s'écrase contre le palpitant ! Suffirait de battre quelques fois des cils. D'être en détresse. Il se retournera sur son chemin, tendra la main, se laissera croquer le bras tout entier. D'aucuns pourraient croire que Seren savait user de ses charmes à bon escient. Mais il n'était pas nécessaire d'user de charme pour que l'autre ne se plie en quatre pour le petit être qu'il représentait. Peut-être simplement que cela accentuerait sa pitié. Son besoin de le prendre une seconde dans une brève étreinte pour lui communiquer un peu de chaleur avant de se retourner dans sa tâche. Mais Edzard cherche la bague d'argent. Se penche sur quelques pavés en espérant apercevoir un peu de quelque chose qui brille, sans trop de succès. « Tu te souviens du chemin que tu as fait ? » Qu'il demande en espérant ne pas aggraver la détresse de son nouveau camarade. Et il croit bon d'ajouter une anecdote pour le calmer ne serait-ce qu'un peu. « Tu sais, une fois, j'ai perdu une boucle d'oreille... C'est encore plus petit ! Et c'est une amie qui me l'avait offerte alors j'avais vraiment pas envie de la perdre. Donc j'ai un peu pleuré (pas trop longtemps) avant de la chercher toute la soirée et je l'ai retrouvée ! On a toutes nos chances, à deux ! » Qu'il ajoute avec beaucoup d'entrain et un grand sourire.