00 campagne française, près d'un champ de lavande et il faisait bon vivre, près de l'océan, loin de tout proche du rien, et dans ses boucles blanches tu y trouvas l'amour sans faille, et dans ses boucles blanches tu ne veux plus jamais détourner les yeux

04 mais la santé du père elle est si fragile, comme neige qui fond. alors tu iras pleurer encore et encore quand les médecins récupèrent le corps qui tremble. mais toujours il revient, toujours il te reprend dans ses bras, il caresse tes cheveux et te raconte les histoires des dieux et des guerres et il te dit ne soit pas le soldat, ne tue pas, ne soit pas le roi, n'oppresse pas, contente toi de chanter mon ange a moi, contente toi de panser les plaies.

08 et un jour on prend ta main. le pianiste ne tient presque plus debout alors c’est le second parent qui arrive et il est beau, mais c’est une beauté brûlante, une beauté qui te force à ne pas regarder. et ça pique les yeux, comme de l’or dans les iris, sous les paupières, dans les cils. il veut nouer des liens il veut faire pousser les fruits, des chênes puissants pour arrêter sa propre chute et tu observes derrière toi

une dernière fois
accompagné sur cette île, une dernière étreinte, un souvenir de son parfum qui reste dans le coin de ton cou, un sourire déchirant que maintenant tu tiens en horreur. tu laisses ton père mourant derrière toi en suivant le divin et tu entres dans la colonie des sang mêlé. et tu dois être fier, tu te dois d'être fier.

15 pour la première fois tu oses , tu avances tu tranches l’air tu veux savoir jusqu’où tu pourras vendre ton âme aux enfers. tu viens alors poser la question, confronter le dieu ; l’aimais-tu ?  - oui .
tu ne veux pas savoir s’il ment, tu ne veux pas savoir s’il prétend
cela te suffit.
tu es dévoué damné aimé et tu marcheras à jamais dans son sillage pour faire entendre la voix de tes frères et soeurs, sa voix à lui
la voix qui fut un temps s’est dite amoureuse du mourant.  

>>29 tu t'es fait remarquer, tu t'es imposé, on t'a volé une vie, la sienne, alors tu te devais d'offrir la tienne pour qu'elle soit splendide, pour qu'on ne puisse être que fier de toi. tu deviens ambassadeur de ton père, tandis que quelques années plus tôt tu t'amuseras à porter le titre de professeur, enseignant l'histoire des arts et les chants anciens dans cette même colonie qui t'a vu grandir.