face au miroir, seraph se tient debout, torse nu. à ses lèvres, une cigarette allumée, à moitié calcinée, sur laquelle il tire sans conviction, tout occupé qu'il est à admirer son reflet.
pensif, le corps éreinté et sublimé par sa journée de labeur, il se perd dans son propre regard.
des doutes, il n'en a jamais eu; à vrai dire, il ignore ce que cela fait, de douter. il lui suffit de se contempler pour renforcer la conviction de sa grandeur. pourtant, il lui arrive encore de faire face à des combattants sceptiques, ceux qui refusent de se rallier à sa cause et préfèrent lui mettre des bâtons dans les roues.
tout le monde n'est pas amené à partager la formidable destinée des spartes, voilà tout...

la porte ouverte, derrière l'épaule de son reflet, l'arrache à son moment d'amour-propre. comme pour piétiner son narcissisme, le visage de miko apparait sur le miroir. puis il ouvre la bouche, et seraph n'a pas le temps d'être stupéfait que cet étonnement a déjà cédé la place à de l'agacement tendant vers l'exaspération.
je peux savoir ce que tu fais là? le ton est vindicatif, s'accompagne d'un mouvement lent pour écraser la cigarette dans son cendrier. il décide d'ignorer le surnom afin de s'épargner une migraine.
lorsqu'il enfile son débardeur et se retourne pour lui faire face, l'affront ne lui en semble que plus grand: miko le dépasse de quelques centimètres. depuis quand? seraph serre les dents.
et tu pouvais pas juste me téléphoner du coup? bien sûr que non. il se demande si miko vient pour lui demander un service; qu'attendre de plus d'un opportuniste? car c'est ce qu'il est, comme le sont tous ceux qui ne comprennent pas la noblesse de la loyauté. me fais pas perdre mon temps et viens-en aux faits. il est dur, seraph. c'est qu'il lui en veut encore. il n'aime pas laisser indifférent. qu'on l'adule, qu'on le déteste ou qu'on le craigne, mais qu'on ne lui tourne jamais le dos, comme si de rien n'était.

@Miko Amouretti

le voir sourire a quelque chose d'agaçant - mais qu'est-ce qui ne l'agace pas, au final? je me suis dit que valait mieux arrêter avant que tu viennes me choper par le col en personne, non pas que j'aurais dit non bien sûr. seraph lève les yeux au ciel et comme pour répondre à la provocation, s'enfonce les mains dans les poches. mur de glace dont le sang bouillonne malgré tout.
tu dois mal me connaitre. la pique est lancée non sans une certaine mauvaise foi; encore une fois, son exigence de stoïcité se heurte à la réalité.
c'est que miko serait venu voir les combats... enfin de quoi sourire! tu viens te divertir? tu restes fidèle à toi-même. c'est bien.
mais très vite, l'attitude désinvolte du fils d'hestia cède à un air étrangement sérieux. s'il est pris de court, seraph n'en montre rien. s'il ne se plaindra jamais de la flatterie, il ne s'embarrasse pas des futilités que sont les mots doux.
l'arène te manque, mh? il hausse le sourcil - mais s'autorise enfin un léger sourire. c'est bien normal. contrairement à ce que tu penses, l'arène ce n'est pas qu'une histoire du divertissement. ce lieu a un sens.
le ton est moins dur, se rapprochant davantage d'un simple sermon d'aîné à cadet, bien que subsiste une certaine condescendance. il ne peut pas s'en empêcher, après tout.
le corps relâche la tension et se détourne de son interlocuteur, vers la table sur laquelle reposent ses ornements. une à une, les bagues sont enfilées aux doigts, puis c'est le tour des bracelets, des amulettes, et du collier, lourd et imposant. mais j'imagine que tu avais mieux à faire. cette fois, il est moins belliqueux, même s'il demeure accusateur. son dernier pendentif passé à l'oreille, il l'interpelle d'un regard inquisiteur.

@Miko Amouretti

du pain et des jeux… il faut admettre que miko a le sens de l’humour. seraph a du mal à savoir s’il se prend au sérieux ou s’il le provoque, mais dans tous les cas, il ne peut réprimer le léger rire cynique qui s’échappe de sa gorge.  une meilleure perspective sur l’ensemble, mhh? si tu le dis… s’il n’en rajoute pas, la façon dont il secoue la tête en dit long.
une fois les bagues passées à tous les doigts, les phalanges se plient et se déplient avec minutie, mouvements devenus quasi-mécaniques à force d’être répétés à la fin des journées de lutte. indifférent à l’idée d’être observé par un autre, au contraire.
il faut bien la flatterie pour raccrocher son regard, dont il ne cherche pas à réprimer l'intensité. au contraire, c'est avec une attention toute particulière qu'il scrute l'impertinent - lui qui ne se gêne pas pour invoquer des louanges doucereuses.
c'est fort intéressant ce que tu me dis là. encore et toujours, l'intonation indolente de celui qui n'est que peu convaincu et qui, loin de chercher à l'être, s'en amuse tout simplement. tu ne comptes pas revenir chez les spartes, je me trompe? puisqu'ils se font à nouveau face, il réduit la distance qui les sépare. le rictus aux lèvres et le sourcil levé, il se plait à le tourmenter - se dit qu'il l'a au moins un peu mérité. et tu continues à m'appeler chef?
cette fois, ce n'est pas un ton accusateur mais davantage la fanfaronnade d'un seraph un peu trop présomptueux, encensé par le plaisir que lui procure la révérence d'autrui.

@Miko Amouretti

à la moue sérieuse de miko, à ses poings serrés et à son front brûlant, seraph répond par un sourire satisfait. il était temps qu'ils aient une discussion d'homme à homme, dénuée des artifices derrière lesquels les beaux parleurs ont coutume de se dissimuler - bien vainement.
il préfère le fils d'hestia piqué, consciencieux, à celui qui feint la légèreté et brandit l'insolence.
non, sa mémoire ne lui fait pas défaut: mais quitter l'arène, c'est en quelque sorte quitter la bataille. encore une fois, seraph, tragiquement loin des hommes, n'a pas conscience du poids de ses attentes. lui qui n'a jamais quitté nausikaa depuis son arrivée, il ne comprend pas ce qui pousserait autrui à le faire - c'est là que le clan sparte s'est élevé, du sable ensanglanté, de la rumeur du public, du fracas des poings. l'arène, son territoire, son champ de bataille - et s'il le faut, c'est par la foule indisciplinée qu'il remportera la guerre.
sa loyauté, c'est ce que lui assure miko, qui lui tient tête sans sourciller. plongé dans son regard, seraph n'est pas prêt de le lâcher.
tu serais prêt à mourir pour moi ?
sinon, ce n'est pas la peine. mais ça, il ne le dit pas. déjà solitaire, au sommet de sa cupidité.
étrangement, il se délecte de cette frustration, qu'il lui est donné d'admirer de si près. de son côté, son agacement premier a laissé place au calme olympien de celui qui jubile de sa démonstration de pouvoir.
non, miko, les règles n'ont pas changé. c'est bien que tu le comprennes. à ces mots, il recule enfin, le gratifie d'une tape vigoureuse sur l'épaule. me voilà rassuré.
il ne sait que se montrer sévère et implacable - c'est que dès la plus tendre enfance, on ne lui a pas appris la reconnaissance. lui qui n'a jamais reçu un compliment ou un sourire gratifiant a du se convaincre de leur futilité.
qui aime bien châtie bien.

@Miko Amouretti

indéniablement, le fils d’hestia reste beau parleur. face à seraph, il sait exactement quoi dire et comment. peu importe qu’il se montre sincère ou qu’il mente effrontément : s’il promet sa dévotion à la légère, c’est en temps voulu qu’il en subira les conséquences.
un demi-dieu sacrifiant la bénédiction d’hébé au profit de sa propre soif de pouvoir, voilà une bien douce pensée… faute de l’arracher à son air pensif, elle lui insuffle une certaine satisfaction.
il va de soi que la conversation s’arrête là. comme pour le signifier, il se détourne, sort une nouvelle cigarette de son paquet presque vide.
seraph? et alors même que son attention s’est éludée de cet échange, miko parvient à raccrocherson regard. à l’appel solennel de son nom, il lève la tête, s’arrête en mouvement. sur son visage, la flamme du briquet projette des ombres dansantes qui lui donnent un aspect lugubre. mhhh ?
s’il compte d’abord l’écouter sans plus d’intérêt, les mots réveillent en lui l’ardeur d’ordinaire ressentie à la vue et au goût du sang. cette fois, le sourire ne se fait pas prier : les lèvres s’étirent lentement mais sûrement, repeignent son expression d’une fierté aveuglante.
la main baisée parcourue d’un tremblement - celui d’un plaisir dévorant, presque à la hauteur de son ambition, le plaisir de se voir vénéré, adulé, déifié -, il reste immobile plusieurs secondes. les yeux ancrés dans ceux de ce disciple si élogieux, si insolent.
tu m’épates, miko… à ces mots, l’étincelle achève sa trajectoire, consume la cigarette. seraph ne bouge pas d’un pouce, inspiré par l’audace de son cadet.
et lorsqu’il est inspiré, il respecte. se fait théâtral.
le styx, je t’y traînerai moi-même, si tu me trahis. ne l’oublie pas. le serment n’est teinté ni de menace ni de moquerie - simplement de la violence dévastatrice si spécifique à l’honneur sparte.
une promesse que miko est capable de comprendre.
pour la première fois, il lui parle d’égal à égal.

@Miko Amouretti

son agacement premier est retombé avec la tension de leur face-à-face. sans grondements et sans venin, il se refait taciturne.
de son côté, miko reste fidèle à lui-même (bavard).
audacieux, aussi. téméraire, sûrement.
et face à l'honnêteté des déclarations, seraph n'est que marbre - perplexe et incapable. le regard impénétrable, l'âme abritée derrière des remparts de béton armé, il se contente d'un hôchement de tête; un geste simple qui traduit l'estime et la considération dans son langage tout en retenue.
à la vue de la bague volumineuse au doigt de miko, il tique du sourcil. l'orfèvre que je vais voir les fait faire à ma taille. et c'est qu'il se sent bizarre, à discuter de choses anodines, lui qui d'ordinaire ne s'embarrasse que peu des mots. l'impression d'être loin des hommes le frappe, encore. les mots qui suivent lui semblen peu naturels mais il se force à les dire. tu n'as qu'à me suivre, un de ces jours. je te montrerai.
lentement, les mains se dégagent de l'emprise, le regard se détourne, la mine reprend cet air concentré dont il se départit rarement. maintenant, si tu n'as rien d'autre à me dire... s'il est lui-même satisfait de leur échange, l'ego gonflé par les preuves de dévotion, il reste peu enclin à l'amicalité. viens demain, il y aura quelques combats qui peuvent t'intéresser. et si tu veux te remettre dans le bain, c'est l'occasion. de nouveau, une tape sur l'épaule, sans même y penser, qui en enverrait valser plus d'un. j'espère que tu n'es pas rouillé.

@Miko Amouretti