(suite direct de ce rp : www) Le temps de calmer ta crise d'angoisse, tu étais resté bien dix ou quinze minutes assis par terre, contre le mur, à guetter la porte dans l'espoir que Midas revienne sur un coup de tête. Mais il n'était pas revenu et le portable trônait toujours sur le parquet de votre salon. Tu l'avais attrapé pour répondre à Precieux, la culpabilité dégoulinante sur ton clavier tactile, à t'excuser mille fois de peur d'engendrer plus de dégoût que de colère. Finalement, un rendez-vous à la clé pour s'expliquer, tu t'étais levé et avais trainé ta carcasse sur plus d'un kilomètre afin de le rejoindre - bonne âme volontaire et complaisante d'accepter de te parler ; la boule au ventre qu'il t'ait déjà condamné.

Tu le vois assis sur la fontaine. Tu ranges ton téléphone et accours vers lui, pataux et penaud. Tu sembles déjà au bord d'exploser avant même d'avoir aligné deux mots.

Précieux... aaah !

Plié en deux, les mains sur les genoux pour reprendre ton souffle, tu redoutes la confrontation par le regard. Déboussolé de ta bêtise, tu cet air candide qu'ont les coupables qui n'ont plus rien à perdre.

Je...

De vive voix, tu ne risques pas d'être traqué et jugé par Midas. Pourtant en cet instant, ce n'est pas son jugement que tu redoutes, mais celui d'un homme que tu as galéré à oublier malgré ta bonne volonté.

Je comprendrai si tu veux plus jamais me parler. Je voulais pas que tu lises ça et c'est pour ça que j'avais jamais envoyé.

C'était intime, une partie de toi.

J'avais juste écris pour moi, y'a longtemps maintenant.

Avant le mariage et avant de savoir que ça serait à jamais sans issue que d'aimer Precieux. C'est un peu un mensonge, car tu as songé plusieurs fois à lui partager pour le faire culpabiliser. Tu as tellement honte, en retrospective.

Je suis abject.

Et ce n'est même pas de la manipulation parce que tu le penses.

Il est parfait, toujours aussi parfait. Le revoir après autant de temps aurait pu t'ébranler, si tu n'avais pas déjà l'âme échevelée à d'autres préoccupations, d'autres tortures. Il te salut sans froideur mais sans chaleur non plus... Sa neutralité est cruelle, elle te laisse libre d'angoisser et de supposer alors que tu veux juste qu'il assène le couperet rapidement - tu es fatigué de souffrir et Midas t'a assez travaillé pour la journée (pour l'année, même).

Il demande ce qu'il s'est passé ;
tu visualises.
Qu'est-ce qu'il s'est passé ?

Midas a pété un cable.

Tu as l'air déboussolé. Tu piétines debout, ta nuque tire. Ta gorge te gratte et tes yeux te piquent. Tu n'es pas à l'aise.

Il a trouvé les lettres et il croit qu'on couche ensemble, que je le trompe.

Foutu pour foutu, tu craches la vérité pour t'en libérer.

Quand il a vu les photos de toi j'ai menti et j'ai dis que t'étais pas important.

Tu ravales ta salive, reprends de l'élan comme si tu te préparais au combat.

Et du coup il flippe complètement... c'est lui qui t'a envoyé.

Du coin de l'oeil tu le remarque se tendre sur ce qui lui sert d'assise. Tu te demandes si tu n'as pas dépassé les bornes, si Midas n'a pas tout simplement raison et que c'est toi le fautif, évidemment. Qui d'autre ? Tu serres les poings et remarques que tu portes encore tes affaires d'équitation. Avec tout ça t'as même pas pris le temps de te changer, tant pis pour Precieux et son nez mais tu dois puer.

Oui.

Tu confirmes pour Seraph d'une moue coupable et abattue. Tu t'en voudrais que cela créé des conflits dans leur relation - tout comme tu ne peux pas t'empêcher de t'en réjouir, même un peu, inconsciemment. Cette partie horrible et malade de toi, elle te fait perdre toute confiance en ton jugement.

Je sais pas...

Il te propose d'aller marcher et tu recules d'un pas, lui accordes de l'espace pour le laisser se relever. À ses côtés, vous vous enfoncez dans le petit jardin. Toi, tu t'enfonces ton marasme.

Au bout d'un moment tu dis pour te dédouaner de ta propre lâcheté. Tu avoues, même si c'est insupportable.

Il me fait un peu peur.

Pourtant tu penses être le seul à même de le comprendre, de le réparer ; Midas est bousillé, tu le crois. Naïvement.

Ils ne sont pas exclusifs. Étrangement ça ne t'inquiète pas... mais ça ne t'apaise pas non plus. Si tu as avoué à bas mot que Midas te fait peur, c'est également le cas de Seraph ; de même que sa proximité avec ton mari de par leur affiliation au clan. Et si Seraph te tombait dessus ? Et s'il venait à penser, sous l'influence coriace et persuasive de Midas, que tu es un danger pour son couple ? Tu commences à délirer, tu essaies de te recentrer ; tu dois faire confiance à Precieux pour tout arranger. Il l'écoutera certainement.

Son aigreur ne t'apparait pas indulgente. Tu te sens incroyablement stupide ; pire ! Tu culpabilises de ne pas réussir à correctement te justifier, il met le doigt sur trop d'insécurités.

Hm...

Tu te mures dans le silence un instant, fixant tes pieds pour faire attention à tu les mets. Tu fuis la confrontation. Tu fuis la vérité.

Il est fort.

C'est le premier truc qui te vient en tête. Tu cherches encore et encore.

Il me fait rire, il s'intéresse à moi.

Mais pas à qui tu es ;
juste à ce que tu es. Ce que tu pourrais lui apporter.

Il reste depuis des années...

Alors tu as cru bêtement que c'était parce qu'il t'aimait - tout en étant persuadé qu'il ne t'aimerait jamais. C'est la perspective d'être celui qui serait capable de le changer qui t'a attiré.

Quand tout va bien je l'adore. Mais parfois il pète des plombs et je ne comprends rien... hormis que tout est de ma faute. Et voilà.

C'est tout ? Tu relèves les yeux, affolé. Non ce n'est pas tout ! C'est pas parce que là, sur le moment, tu ne trouves rien d'autre, qu'il n'existe pas du bonheur, au moins en infime, lorsque tu es avec Midas. Les jours où tout va bien... C'est grave à quel point tu t'es accoutumé à un faible niveau d'exigences et de standards, parce que même le strict minimum de sa part est glorifié comme un étendard.

Tu soupires, tu ne sais pas comment exorciser tout le malêtre qui t'anime. Tu ne veux pas admettre que tu as fait le mauvais choix.

Oui bien sûr... Mais c'est lui, c'est comme ça. Je l'aime comme il est. J'aimerai juste...

Qu'il ne soit pas injuste ;
pas cruel ;
moins brutal.
((Qu'il ne te voit pas comme son ennemi dès lors qu'il pense que tu le fuis))

Bah qu'il se calme un peu quoi...

Ça y est, tu sais plus quoi dire. La détermination de Precieux à régler ses comptes te file la boule au ventre. Il y a encore moins d'une heure tu angoissais qu'il te déteste - cette perspective se révèle encore pire.

Non !

Tu paniques.

Non s'il te plait... J'ai pas envie que ça s'aggrave... Il va croire qu'entre nous c'est sérieux et qu'il a raison de me croire infidèle ! Enfin, je vais régler ça avec lui, lui expliquer calmement qu'il y a rien.

Rien est un oxymore.
Tu joins les mains.

S'il te plait s'il te plait s'il te plait...

Il se lève d'un bond, tu recules d'un pas. Il a l'air en colère, à en croire par le ton abrupte de sa voix et le feu qui crépite dans le fond de ses yeux bleus. Tu ne le crains pas lui en cet instant, mais à toutes les conséquences que tu crois entrapercevoir dans son dos, comme un flash bien trop réaliste qu'on voit dans les séries télés. Tu sens ta crise d'angoisse repartir de plus belle.

Non non non ! Ce n'est pas ça !

Tu ne sais pas comment l'expliquer. Tu ne sais pas comment argumenter. Tu penses aux bases : Midas est dangereux, têtu, redoutable. Tu ne veux pas le voir tout détruire sur son passage. Tu le crois assez forcené pour ravager vos relations ; déjà qu'il n'en reste aujourd'hui que des piliers branlants et instables. Que subsistera-t-il demain quand il les aura brisé d'un vulgaire coup de pied ?

Ok... Laisse-moi quelques jours pour arranger la situation... Si je n'y arrive pas tu pourras lui parler... Ça te va ?

Tu n'aimes pas lui commander. Tu lies les mains de nouveau, poses ton front sur la jointure pour l'implorer.

Haha...

Le rire est nerveux, fuyant. Tu pensais que Precieux serait dégouté par ta personne ; pas par Midas.

J'ai cru... J'ai cru que t'allais me demander de rester loin de toi et de plus jamais t'approcher. Tu sais je voudrais jamais te faire de mal ?

Cette manière qu'il a de vouloir défendre ton honneur, ça te touche.

Je peux régler ce conflit proprement.

Comme un grand.

Pendant un instant, tu t'accroches à l'absurde alimenté par la nostalgie et le reste d'amour, qui subsiste au creux de ta poitrine. Tu ne réalise pas tout de suite que supplier ne sert à rien - car Precieux est libre, égoïste ; et s'il était prisonnier de quelque chose ce serait de ses impulsions intenses et linéaires. Tu ne peux pas arrêter le vent qui a décidé, intrinsèquement, de souffler et de s'abattre avec force sur les paysages désolés.

((Qu'importe tu supplies la tornade de s'arrêter))

Le couperet tombe (enfin !) ; tu ne l'attendais plus. Tu relèves des yeux blessés vers lui, sourcils froncés. Tout le monde s'est accordé à te faire comprendre qu'ils détestaient Midas. Que Midas piétine tout sur son passage, y compris ton entourage. Mais quel entourage ose se prétexter ami quand il préfère se rétracter face au danger ?

Je...

Mais voilà. Il le dit lui même. Vous n'êtes plus ami, vous n'êtes plus rien.

Si tu fais ça, ça sera pire... pire pour moi.

Tu essaies de lui faire comprendre. Lui demandes, silencieusement, si pour une fois il peut penser à toi plutôt que de penser à lui. Tu plaques une main sur ton torse.

Si je le perds lui, je n'ai plus personne. Plus rien. Plus rien !

C'est ce qu'il s'est évertué à te faire croire - mais les autres se sont tous amusé à lui donner raison.

Ça sera pire...

Tu trembles, te détournes de lui.

De toute façon tu t'en fiches... Laisse tomber, je... je suis désolé de t'avoir mis dans cette situation impossible, j'espère que ça ira avec ton mec.

Prêt à partir, à rentrer.
Ça te file la nausée.