cw // drogues

elle est prisonnière de son propre désir de liberté. à Nausikaa, c’est une âme en errance. depuis des années, elle danse avec l’idée de l’évasion, essaie de se convaincre, maintes fois, que franchir la frontière ne serait qu'un pas à peine plus grand que ceux qu'elle prend chaque jour dans sa cage dorée. pourtant, elle demeure captive, enchaînée par des liens forgés dans les tréfonds de son être. c’est parce qu’on lui a toujours dit, à Maeve, que le monde extérieur n’était plus fait pour elle. alors elle a écouté. elle a accepté cette destinée avec résignation. et puis un jour, elle a rencontré Daniel. un peu au hasard, juste comme ça - elle s’est toujours dit qu’on ne pouvait le rencontrer que par hasard. ils se sont revus plusieurs fois déjà. il lui a fallu seize ans de sa vie pour se trainer à l’entrée du domaine. Daniel lui, il a juste sourit, et c’était soudainement plus facile. on va trop s’amuser ! c’est comme ça qu’il l’a dit. alors Maeve a juste répondu ok. mais tu payes.

c’est ce qui lui passe par la tête tandis qu’elle laisse les lumières étincelantes de la ville danser devant ses yeux émerveillés. le temps s’effiloche dans la nuit, elle ne sait plus trop quelle heure il est, oscille entre le trop tard et le trop tôt. malgré le voile de l’ivresse, elle s’efforce de saisir chaque instant, de capturer les souvenirs fugaces qui s’offrent à elle. après tout, on ne visite pas New York pour la première fois tous les jours !

c’est la voix de Daniel qui la sort de sa torpeur. c’est vrai qu’on s’amuse bien ici. mais c’est pas terminé, hein ? on va pas rentrer tout de suite ? elle se redresse avec un élan renouvelé, se rapproche de lui dans une aisance familière. autour d’eux, les rues ne se fatiguent pas, continuellement animées au rythme de leur énergie. et lorsque Daniel dévoile le petit sachet de sa poche, Maeve réprime un frisson d’anticipation. effectivement, la soirée ne fait que commencer. elle le laisse la narguer, s’amuse de son petit numéro, observe son expression sous les reflets dansants de la voiture. les substances, elle a déjà fait. elle ne sait pas trop si elle a vraiment aimé ça. la vérité, c’est qu’elle n’est pas très avide de la perte de contrôle. quand elle se laisse aller, elle aime être pleinement présente, sentir chaque battement de coeur, chaque souffle échappé. ça la dérange un peu, les souvenirs flous et les trous noirs dans son esprit. elle aimerait tout garder, les sons, les odeurs, les images et même les goûts. surtout les goûts. alors face à Daniel, elle a un petit mouvement de recul, quasiment imperceptible, juste le temps d’analyser la situation. mais voilà que ça la prend, cette envie de tout posséder immédiatement, ce besoin viscéral de tenir le monde entre ses paumes. dans l’euphorie du moment, elle tente de mettre la faute sur la boisson.

j’suis pas timide déjà. et puis elle plonge dans un baiser qui éclate dans l’habitacle. elle prolonge le moment, apprécie chaque instant de leur étreinte avec une intensité dévorante, se délecte de ses lèvres contre les siennes, de sa chaleur enveloppante. elle en profite à sa manière, savoure l’idée du goût qu’il pourrait avoir, le dévore en douceur, car ce n’est que Daniel après tout. et sois plus poli la prochaine fois, t’as même pas dit s’il te plait ! elle le taquine en s'éloignant, le ton léger. merci quand même. elle tire la langue de façon espiègle, puis exhibe la pilule qu'elle a récupérée directement de sa bouche, avant de la faire disparaître à nouveau. Maeve s’affale sur la banquette de la voiture, laisse sa tête retomber toute proche de celle de son ami. elle soupire, les mains nouées sur le ventre et les yeux rivés au plafond. on devrait aller danser.