tw agression sexuelle

Naissance Nour Jaroudi est en séminaire à New York City pour présenter sa thèse et obtenir des financements ; il est beau, charismatique, parle bien, et elle aussi, elle l'est, tout ça, reconnue par ses pairs. Ils boivent du champagne - beaucoup de champagne avec les investisseurs et les intellectuels, elle est intéressée puis ne l'est plus, elle a trop bu après tout. Il n'était pas question de choix. Neuf mois plus tard, Rafqa naît d'un déni de grossesse : il ne sait pas si Nour ne se rappelle plus de la demande que son prénom commence par un D ou si elle a fait exprès de l'ignorer. Elle l'aime sans père. Il n'est pas question d'un dieu mais d'un homme qui l'a agressée alors qu'elle n'avait que vingt-quatre ans.
6 ans Nour est en couple avec un de ses collègues six ans plus tard. Il considère Raf comme sa fille et cela ne change rien quand son premier petit frère naît.
9 ans Une nymphe vient chercher Raf jusqu'au Canada, Nour ne la croit pas ; déni de la nature divine, la magie météorologique est vue comme du hasard, la force est à peine supérieure pour un enfant qui aime la bagarre et le sport. Les adieux sont déchirants. Raf a appris bien plus tard que sa mère a fait une fausse couche suite au choc de son départ.
11 ans Les jours sont beaux mais le camp n'est pas si grand : confusion sur le genre, Raf palpe sans comprendre le malaise d'être perçu comme un garçon à force de jouer avec, après avoir demandé à un des éducateurs de lui couper les cheveux. Les enfants sont cruels, Raf ne l'est pas : il continue à jouer le jeu des garçons, toujours prouver qu'il est plus fort, plus courageux. Il joue davantage le chevalier que la princesse, le papa que la maman, quand il joue avec les filles. Il aime cet entre-deux.
14 ans Toujours pas revendiqué, il voit celleux à qui il s'attache aller dans d'autres bungalows. Naturellement plus proches des enfants d'Hermès et d'Hestia, il ne fait aucune distinction : les aime tous et l'adolescence ne lui inspire aucun chagrin, au contraire. Il aime voir comme les individus se forment, se ravit des prouesses des enfants de Déméter, de la beauté des enfants d'Aphrodite, de l'ingénierie des enfants d'Héphaïstos. Il n'a aucun parent à qui faire une offrande, à table : il remercie Hestia et Hermès, et puis sa mère, Nour, mortelle. Il finira par arrêter, se demandant si ce n'est pas à cause de cela que son père ne le revendique pas.
18 ans Plus jeune que la plupart de ceux qui quittent le camp, il insiste pour se jeter dans l'isthme : il a soif du monde et de grandir. Il a accepté qu'il ne sera jamais un héros : cela ne résulte d'aucune frustration, aucun chagrin, seulement l'acceptation que sa destiné se trouve autre part que dans la prolongation du devoir divin. Il préfère tirer de belles conclusions. Les figures politiques sont des idoles pas pour leurs ambitions et leurs idéaux mais pour leur liberté et leur force, leur individualité. Il se questionne, se cherche, se coupe les cheveux, encore, se tatoue - pour la première fois, lui-même puis une amie rattrape son tatouage.
19 ans Il sort sur New York mais se sait en danger. Ne le fait que rarement, surtout quand sa mère et le reste de sa famille est de passage. Il veut continuer à nourrir les liens avec eux. Il a tenté de s'introduire dans la société, sur l'île, a vécu un temps en colocation en travaillant aux forges pour faire de la manutention. Son dos qui lui tirait déjà
le fait s'arrêter, du moins, il sait que ce n'est pas pour les bonnes raisons ; il cherche une communauté.
20 ans Il a admiré les enfants d'Arès et a commencé à s'entraîner pour rejoindre les spartes, faisant des petits boulots à côté. Il enjolive la réalité, voit uniquement l'aspect sublime du clan et la fraternité qui en dégage - attiré par l'idée d'être entouré, par son rapport complexe à son corps et sa masculinité, il y va avec beaucoup de confiance et de volonté et est persuadé de réussir à faire les épreuves. Il parvient jusqu'à la dernière, très difficilement, et exige avec l'arrogance de la jeunesse son adversaire. Il veut leur montrer qu'il est digne, cela passe pour de l'insolence - ce que c'est, sûrement. Il en ressort balafré et traumatisé par la violence des différentes épreuves.
21 ans Raf rejoint un squat dans l'Atè et trouve une raison de vivre et une richesse dans les égaré.es et leurs mille savoir-faires. Il retrouve ce qu'il aimait autant au camp : c'est là que se trouve la liberté, parmi les égaré.es. Il glane après les récoltes à Nomos, aide aux forges ou aux champs de temps à autre pour donner un coup de main ; apprend beaucoup, autant à se faire des idéaux que la méfiance. Des politiques, des croyances - il en porte les cicatrices au coeur et sur le visage. Il se comprend mieux : il commence à prendre de la testostérone, pleure après chaque rupture amoureuse. Ce n'est pas uniquement un échec sentimental mais un échec identitaire. Il a peur de finir seul.
23 ans Opposition, colère, il n'est pas d'accord - il était au festival, lui aussi. Il ne comprend pas les mesures intérieures. Se demande pourquoi elles ne se tournent pas vers l'extérieur - mais quand lui pense à l'extérieur, il pense au ciel où les dieux résident, pas à une guerre directe avec les monstres.
24 ans La situation change : l'île est envahie, les olympiens tombent et un des représentants des égarés, si ce n'est le plus important encore vivant et actif, est plus directement au pouvoir. Cela lui fait peur, et ce n'est pas le seul. Ils veulent faire briller l'Atè mais lui aimait les ruines, c'est là où se cachent les mille-pattes et les herbes hautes. Il bloque le squat pour empêcher qu'il soit réhabiliter et propose d'en faire un lieu de vie, un lieu d'échanges pour initier les mouvements - peu importe leur nature, peu importe leur teneur, tant que le ciel les voit et entend qu'ils refusent d'être des pièces de l'échiquier. La revendication en même temps le terrifie : il n'en fait pas de bruit. Il veut le chaos, il veut coller des affiches, il veut faire des bruits, après tout le boucan du tonnerre peut venir du sol.